posté le 21-10-2017 à 07:48:21
LA FORCE OU LES ÉNERGIES
L'image de cette lame est le reflet très inspiré d'un manuscrit du 15ième siècle illustrant une Bible où l'on peut voir Samson ouvrant de cette manière, par la force, la gueule d'un lion. Sur cette lame, la femme tient le lion de sa main droite par le nez, qui ressemble à une cheville, et pousse de sa main gauche la mâchoire inférieure vers le bas. Elle enserre de ses deux genoux le corps du lion. Elle est coiffée d'un chapeau surmonté d'un épi de blé mûr, placé horizontalement.
Dans le tarot ancien de Marseille : Cette lame inspire et requière la maîtrise absolue, elle n’est pas sans prévenir d’un danger, il n’est pas donné à tout le monde de tenir ouverte la gueule d’un lion, le roi des animaux qui ramène à la notion de couronnement c’est à dire de succès, dans l’entreprise. Il est bien évidemment de couleur jaune. Non seulement cette lame possède les qualités et le potentiel de la papesse, mais en plus, elle en a la totale maîtrise. Il est à noter une chose curieuse, comme si la tête du personnage avait été rapportée. Le fait de ne pas assumer cette maîtrise pourrait-il faire perdre la tête au chercheur ? D’autant qu’au-dessus de cette dernière nous trouvons le symbole de l’infini, encore une bien étrange coiffure, qui ne paraît pas réellement posée sur la tête de la dame, mais semble plutôt planer à la hauteur du front. La main droite se distingue de la gauche par une manche de poignet plus importante. (Toujours la main opérative) On remarquera que les chakras 2-3 et 4 sont connectés et reliés entre eux. Il n’y a aucun décors, le fond est blanc, seul un curieux pied semble ne reposer sur rien, un rappel à l’état de pureté est donc ici rappelé. Cette lame est une invitation à la maîtrise de l’impalpable, du subtil par d’une part, le symbole de l’infini, en haut et les pieds qui ne touchent aucun sol, en bas.
Dans le Tarot des Alchimistes : La onzième lame du Tarot va nous permettre de revenir sur l'une des Vertus que nous avons souvent visitée dans nos sections en reprenant l'examen des médaillons des Vices et des Vertus du grand portail de Notre-Dame de Paris. C'est la volonté dirigée qui est mise en évidence, c'est-à-dire l'Esprit liée à l'Âme pure. Quelle meilleure image ne pouvait-on trouver que cette Vierge, domptant ce Lion ? Ce qu'en termes hermétiques, il faut comprendre comme l'évolution du Lion vert en Lion rouge. Si nous revoyons la Force du tombeau de François II, duc de Bretagne, la statue se présente, le bras gauche tenant une tour d'où elle sort un dragon, serré au col et sur le point d'expirer. Il s'agit du dragon écailleux de la lame X, c'est-à-dire du premier état du Mercure et non point, comme on pense trop souvent, quelque materia prima que l'on tirerait de son gîte minier. Non. C'est l'évolution du Mercure qui est symbolisée par cette lame 11. Du reste, cette évolution est reproduite dans les couleurs qu'elle arbore : le rouge recouvre le bleu. La fonction alchimique de la Vierge consiste à tirer partie du sang du Lion Vert, en sorte de le transformer en Lait de Vierge, qui sert à nourrir le Rebis en sorte de la faire évoluer, peu à peu, dans sa forme suprême d'escarboucle des Sages. Les Hermétistes considèrent que cette lame XI ne trouve pas de lame complémentaire et qu'elle constitue donc un passage obligé dans le magistère. Car tuer le Lion vert ruinerait à jamais les ambitions de notre Artiste : les Sages ont bien dit que l'œuvre devait être faite par le seul Mercure.
Nous devons rapprocher de cette lame l'emblème 49 de l'Atalante fugitives, et notamment le commentaire à propos du signe du Sagittaire, 2ème décan ou l'on peut établir un rapport net entre le combat d'Hercule avec le lion de Némée et notre Force.
Au Laboratoire : Il faut fixer la part volatile du dragon sous l'œil attentif du lion qui démarque le souffre philosophique, animal solaire qui fréquente les zones de liberté plutôt que les sombre cavernes. Les énergies en jeu mettent en action un personnage lunaire (la tête surmontée d'un croissant), dont la vocation devrait être la passivité. Mais ici, armée d'un bâton (lié au symbole du feu), elle se mobilise pour dompter, c'est-à-dire fixer, le dragon lié au feu des cavernes et à l'eau des marais.
Alchimiquement, il faut tuer le dragon et le dissoudre dans son propre sang de façon à désigner le lion vert pour en fixer la sève en un terrain propice à la germination. Cette action favorise l'évolution de la nature mercurielle vers la stabilité. C'est en recommençant plusieurs fois l'opération précédente tout en rajoutant constamment une part de notre matière essentielle, que l'alchimiste augmentera les énergies en jeu au sein de la cornue. A chaque réitération, une nouvelle lutte se produit entre les parties, le but étant de fixer les éléments volatils de la matière en les contraignant.
Architecture cosmique et recherche Géométrique : La Force est, au premier niveau de lecture, le nom d'une des quatre vertus cardinales. Et une vertu est une énergie de l'âme. On pourrait dire alors que la Force est le symbole de la vertu. Mais le mot "Force" désigne également un terme d'architecture. Ce qui nous dirige vers la clef d'interprétation au niveau des constructeurs : l'épi.
Il désigne aussi un ornement fait d'une tige munie de branches, que l'on plaçait au Moyen âge et à la Renaissance au sommet des toitures pour décorer le faîtage. Tout s'éclaire alors : l'épi, en tant qu'ornement, se relie analogiquement à Vénus, planète d'art et de beauté.
Le Chapeau, un autre terme d'architecture qui désigne une pièce de bois horizontale qui réunit la tête de plusieurs poteaux, cette pièce pouvant être justement le faîtage. Ainsi l'épi sur le chapeau nous indique que nous somme arrivés à la fin de la construction de l'édifice, à son sommet.
Revenons au début : Le Maître d'Oeuvre, le Bateleur, a conçu le projet. La Papesse a ouvert le livre qui contenait la science nécessaire à l'élaboration du projet. L'Impératrice a donné le premier tracé en élévation. L'Empereur a montré comment construire la porte du temple avec son trumeau et son tympan. Par lui, nous sommes rentrés dans l'édifice sacré. Le Pape nous a montré la construction d'une coupole avec la pierre d'angle. L'Archer et l'Amoureux nous a donné le secret de l'appareillage en dents de scie et montré comment construire des arcs. Le Chariot ou char d'or nous a montré l'importance du transport des pierres et du carré long. La Justice nous a appris à balancer correctement, avec justesse, les marches d'un escaliers. L'Ermite enfin nous a mené par un escalier en spirale jusqu'à la lanterne. Il nous a enseigné la prudence et l'importance des escaliers dès le début de l'élévation de l'édifice.
A la suite de l'escalier tournant, grâce à la roue de Fortune, nous avons visité le clocher et découvert les cloches situées dans les combles, partie de l'espace intérieur comprise sous les versants du toit et séparée des parties inférieures par un plancher ou une voûte.
Nous voici maintenant arrivé au toit : à sa charpente et à sa couverture, la disposition des "grains de blé" rappelant la disposition de certains matériaux de couverture, qu'il s'agisse de tuiles ou d'ardoises. "Couverture", n'est-ce pas là l'un des sens suggérés par le mot kapar, "couvrir" ?
Le sens du mot "Force" commence à s'éclairer : l'épi nous amène à la "ferme". A la "ferme" qui en termes de charpenterie, désigne un assemblage de pièces de bois destiné à supporter la couverture d'un bâtiment.
L'épi, le faîtage ou chapeau, des pièces diverses de renfort comme les jambettes et les jambes de force. Les jambes de force qui enserrent le lion symbolisent alors ces deux pièces si importantes de la charpente : les forces, indiquées par les deux bandes obliques placées dans le coin inférieur droit de la figure. Les différentes pièces de bois s'assemblaient par tenons et mortaises.
C'est ce que nous suggère une partie de la lame. La main droite de la Force tient le nez du lion, elle "tient", nous "tenons". La gueule ouverte du lion tenue par sa main gauche pourrait mordre, elle "mord". Nous voyons le jeu de mots évoquant dans la langue des oiseaux "tenons" et "mortaise". Et sans les chevilles, rien ne tenait...
Traçons la ferme sur l'image : Les barres obliques, de la même couleur or que celle de l'épi, sont situées à l'emplacement de la jambe gauche de la Force. Elle pourraient donc suggérer les forces de la ferme.
Tarot, Alchimie et Franc-Maçonnerie nous indique que l'être psychologique subit, d'une part les pulsions (ou impulsions) de l'être de chair (terrestre), et doit compter, d'autre part, avec les aspirations de son être spirituel. Ce qui fait dire aux mystiques que le feu de l'esprit s'oppose (et doit s'opposer) aux pulsions de la chair.
Arrivés au grade de Royal Arch (13ième du REAA) les maçons (trois mages venus de Babylone) parcourent l'édifice des séphiroths en partant de Malkhout. Ils montent le long des séphiroths et arrivent jusqu'à Kéter, la 10ième sephirah en partant du Royaume. C'est alors qu'ils aperçoivent une 11ième porte. C'est celle qui sépare Kéter de l'Ein sof (l'infini), celle qui mène au-delà de l'arbre. Au delà de la manifestation. Hénoch, le mystérieux initié initiant de ce grade, devenu l'ange du Trône, avait sans doute franchi cette porte.
Ce n'est qu'en luttant pour maîtriser ses pulsions que l'être créera un courant d'énergies favorables à son évolution. Mais ces pulsions inconscientes font partie de la nature des choses et la lutte ne peut être radicale. Il faut utiliser l'énergie même de l'adversaire comme le fait un pratiquant d'art martial oriental, et la détourner à son profit. Là où le rationalisme veut extérioriser et au besoin utiliser la violence pour libérer, la pratique alchimique engage l'énergie pulsionnelle et vitale dans une circulation purificatrice...
Jakin,