Titre du blog : Les Black's Foot
Auteur : Jakin
Date de création : 03-09-2008
posté le 06-07-2019 à 07:14:34
LE GRAND MAITRE ARCHITECTE
Pour comprendre un grade il faut commencer par son histoire. Le degré de Grand Maître Architecte apparaît sous le titre d'Architecte dès 1746, sous la plume de l'abbé Larudan dans "Les Francs-maçons écrasés". Le Grand Maître Architecte apparaît ensuite dans le Rite de Perfection, élaboré à l'initiative du Conseil des Empereurs d'Orient et d'Occident. Le REAA l'intégrera dans le rite en 33 degrés, à la même place.
Pourquoi cette brève présentation du 12ième degré ? Comme nous allons le voir il assume, dans la Loge de Perfection, la fonction de Pédagogue et transmet par là à l'initié un double message : "Apprends de ceux qui sont plus avancés dans l'Art royal ! Apprends à ceux qui le sont moins que toi !"
Cette fonction d'enseignement est à comprendre au sens noble : non pas introduire des savoirs livresques dans la tête d'élèves indisciplinés mais transmettre le désir de se questionner soi-même. Ce qui est, peut-être, au fond la finalité sociale même de toute initiation.
Pourquoi est-ce au Grand Maître Architecte de jouer ce rôle ? Pourquoi au 12ième degré ? Depuis la mort d'Hiram, on ne sait plus très bien comment s'effectue la transmission de la Connaissance (C'est-à-dire le questionnement individuel). Du Maître Secret à l'Elu des Douze, tous sont attelés à d'autres tâches. Il y a donc un manque. En outre, on peut prétendre que l'enseignement n'a pas été assez complet puisqu'Hiram prouve par son assassinat, que certains Compagnons n'ont pas appris des actions fondamentales sur eux-mêmes. Un degré de Pédagogie s'imposait, donc. Salomon y pensa ! Il serait plus correct de dire que nos paires y ont pensé !
Dans ce grade que vous venez de traverser, la légende d'Hiram nous raconte donc que Salomon a créé une école d’architecture pour former ceux qui conduiront les travaux du Temple. Il veut également instruire les Vrais Maçons dans l’Art Royal en faisant passer dans cette école ceux qui le servent avec zèle et dans la perfection absolue. Il crée pour eux le grade de Grand Maître Architecte.
Cependant, la création de cette école et son but semble quelque peu ambigus. Les élèves en sont clairement les Sublimes Chevaliers Elus, quels peuvent bien être les professeurs ? Il est évident qu’il ne faut pas s’attacher à la lettre et au réalisme de nos légendes. Mais malgré tout, cette question ne me semble pas dénuée d’intérêt et il est légitime que vous vous la posiez ?
L’Intendant des Bâtiments avait acquis une bonne maîtrise de son Art et le Sublime Chevalier Elu une grande valeur morale. Le titulaire du 11ième degré maîtrise, par conséquent suffisamment ces deux volets nécessaires à celui qui veut terminer le Temple, Connaissance et Vertu. Que lui manque-t-il donc encore et quel Maître pourra le lui donner ?
Bien curieuse situation dans laquelle nous nous trouvons à cette étape de notre recherche. Nous savons que nous pouvons appréhender l'énergie de l'Etre uniquement en nous et pourtant, nous devons devenir instruits et experts, vérifier notre route auprès de ceux qui l'ont déjà parcouru. D'un côté, cela révèle le côté dynamique de la vie spirituelle, de l'autre c'est l'indice que nous n'avons pas encore atteint la perfection.
C'est avec ce regard nouveau que l'élève architecte va partir à la découverte du monde. Il ne s'agit plus pour nous d'imaginer des constructions qui seront en fin de compte l'expression de notre ego, de nos traumatismes ou de nos fantasmes, mais de voir comment ceux qui étaient déjà Grands Maîtres Architectes ont mesuré le monde avec les outils d'une intelligence objective et constructive, et quels édifices ils ont décrits.
En fait avec le Grand Maître Architecte, l'initié délaisse l'art de bâtir pour se concentrer sur le déploiement de la gnose. Il fait passer de l'architecture du Temple à l'architecture de la Connaissance. En ce sens, ce 12ième degré est le plus petit commun multiple des degrés de la loge de perfection.
Le but n'est pas de devenir de grands érudits, des savants incollables mais de connaître suffisamment les Grandes Lois de l'Univers pour le reconnaître sous toutes leurs formes et de construire, dans la limite de la Terre, notre Temple, en nous et en harmonie avec l'univers.
Nous sommes Grands Maîtres Architectes et nous connaissons l'enivrante vérité spirituelle sur l'architecture de l'univers. Nous voulons intégrer notre connaissance à notre propre vie pour rendre la chose vivante. Nous sentons l'impérieux besoin de pénétrer quelque part au tréfonds de notre Etre pour nous trouver face à face avec la Lumière.
Ainsi nous sommes directement confronté aux questions existentielles qui fondent la recherche spirituelle et dont l'embryon de réponse se trouve dans les mythes que nous jouons.
Car le but n'est pas de devenir l'esclave des mythes qui nous sont proposés. Ce serait rester spectateur et risquer de devenir dogmatique. Il ne s'agit donc pas, dans le parcours maçonnique, de se rallier à une cause mais plutôt de trouver ses propres fins. A travers les identifications successives (je suis comme le héros et le héros est comme moi), l'initié se forge ses propres mythes : il active les archétypes qui sont, en lui, autant de dieux, d'intermédiaires, d'anges, de séphiroth car l'âme est polythéiste. Puis il concentre ces archétypes autour du Soi, l'archétype de l'Unité, du Principe qu'il est impossible de connaître et l'Innommable de nos rituels. Car l'âme est aussi monothéiste.
Je conclurai mon propos une fois de plus avec cette phrase de notre Frère Alain Pozarnik pleine de bon sens : "Nous ne cherchons ni gloire, ni richesse matérielle, nous avons simplement soif de vérité. Dans le silence et l'immobilité de notre pensée, dans notre attention vigilante, dans notre regard bienveillant il y a une grande détermination. Parce que rien d'ordinaire ne peut venir nous troubler, nous sommes prêts à supporter tous les outrages et toutes les humiliations pourvu que nous soyons baignés par l'énergie lumineuse qui brûle en nous"...
Jakin,