posté le 06-02-2025 à 07:43:06
LE CABINET DE RÉFLEXIONS
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Dans le Rite de Memphis Misraïm, la transmission de l’hermétisme se réalise dès les trois premiers grades de la Loge Bleue et commence effectivement par le Cabinet de Réflexion où le profane va vivre l’épreuve de la Terre.
Déjà, le titre de Cabinet de réflexion ne permet pas de percevoir sa nature réelle, car cette expression implique que l’on y est placé pour réfléchir, donc accomplir un retour sur soi, alors qu’il s’agit plutôt de « sortir » de soi qui est l’enjeu de ce passage.
Sa fonction est donc déterminante. Quel destin attend celui qui est dans le cabinet de réflexion : devenir un homme amélioré ou être un initié par la transmutation ?
À ce sujet, je défis quiconque de me trouver un seul symbole maçonnique dans le cabinet de réflexion. Alors que seuls des symboles Hermétiques sont présents. L’impétrant devra, plus tard, se poser la question fondamentale : où sont passés tous ces symboles, une fois le Temple franchi ?
Poussons maintenant la porte du Cabinet de réflexion. L’impétrant est cueilli par une obscurité profonde, que perce à peine la flamme d’une unique bougie.
Selon les alchimistes occidentaux, « l’adepte doit retourner au sein de sa mère, où même cohabiter avec elle ». Évidemment, la mère symbolise la Nature à l’état primordial. Contrairement à ce qui se dit souvent, le profane n’est pas là pour y mourir, mais bien pour s’y transmuter en germe de vie initiatique afin d’être mis au monde du Temple, parachevée par l’Air, l’Eau et le Feu.
Il doit à présent rédiger son testament philosophique qui n’en est pas un. En effet, il s’agit d’un essai de dire ce qu’il se passe réellement dans le cabinet de réflexion. L’objectif est de subir déjà une transmutation radicale, brutale de son humanité pour laisser place à l’initiation et y vivre une purification par la Terre.
Le passage par le Cabinet de réflexion doit donc faire surgir une volonté, dégager l’essence d’un être, son feu qui est seul capable de vivre la transformation par l’épreuve du Feu. Le Cabinet de réflexion donne à vivre une première purification ; il fait émerger le feu de l’être dont l’individu est l’enveloppe.
Bien que l’épreuve de la Terre soit un voyage immobile, il s’y déroule un véritable rituel, mais un rituel très particulier puisqu'aucune parole n’y est prononcée. L’être est immergé pour la première fois dans l’univers des symboles, et doit tenter de déchiffrer leur langage, qui parle de connaissance et de spiritualité. Un moment très particulier de l’aventure initiatique.
C’est aussi l’occasion de redécouvrir le lien avec la vie symbolisée par la flamme qui y brille et les symboles hermétiques que sont : le coq, le crâne, le sel, la faux et le sablier, le sel, le souffre et le mercure, le miroir, le pain et l’eau, des sentences et le mot VITRIOL.
Le Coq : Racine celtique kog, qui signifie rouge. Oiseau de Lumière, ancêtre de la tradition égyptienne (Phénix Benou), Oiseau du dieu de la médecine selon Esculape. Il accompagne le soleil. Il fait passer les êtres des ténèbres de l’ignorance à la lumière de la connaissance. Le coq incarne la fonction de faire germer ce qui est caché dans les ténèbres — de faire ressusciter. Il est lié à la voie longue.
Le coq, flanqué sur le mur du cabinet de réflexion comme un hiéroglyphe à déchiffrer, signe l'aspect volatil d'une même matière que les anciens philosophes nommaient Mercure.
Le coq est le symbole alchimique du vitriol, formé par la cuisson du sel et du soufre. Au début du Grand Œuvre, le lion vert (la matière première) est soumis au feu de l’athanor et se trouve agressé par le renard dont la queue figure le soufre. Basile Valentin parlant de soufre se muant en vitriol fait dire à l’adepte que « le coq mangera le renard » et au final, un coq triomphant symbolisera l’issu de sa confrontation avec le lion.
C’est pour cela que ce symbole est associé à la sentence : Vigilance et persévérance, deux termes qui signent la voie longue ou la voie Brève ; des qualités mythiques liées à l’Art Royal, à la résurrection et aux Grands Mystères.
Le Crâne : À vrai dire, il ne s’agit pas d’une tête de mort, mais fait référence à la tradition védique qui représente le soleil comme un titan à qui l’on a tranché la tête. Cet aspect du crâne confère une dimension symbolique, solaire, lumineuse, renforçant celle du coq (que l’on retrouve dans le mythe d’Orphée). Le crâne introduit ainsi dans le cabinet de réflexion, à l’intérieur de la terre, un ciel qui est le toit d’un édifice à construire à l’image de l’univers (tout ce qui est en haut est en bas, etc.). C’est le moment délicat de la sublimation, c’est celui du Caput mortem, lorsqu’il faut couper la tête, afin de voir apparaître le cygne blanc, thème alchimique de la putréfaction.
Faux et Sablier : La faux est censée évoquer le cours inéluctable du temps qu’aucune date ne fixe, jusqu’à l’arrêt de son défilement qu’est la mort. Alors que le sablier peut être retourné pour mesurer un nouveau cycle. Par le sablier, l’impétrant doit prendre conscience du passage du temps dispensé au « temps » rituel dont son séjour dans le Cabinet de réflexion est une première modalité. Le Sablier et la Faux sont un rappel de l’œuvre ininterrompue du temps qui domine et survit aux formes transitoires contenues dans la Table d’Émeraude.
Sel, Souffre et Mercure : Nous sommes en présence de l’héritage des alchimistes. En effet, Sel, Soufre et Mercure sont considérés comme les trois principes à la base du Grand Œuvre permettant l'obtention de la Pierre Philosophale. C'est le miracle d'une seule chose dont parle l'un des textes alchimiques les plus fameux : la Table d'émeraude d'Hermès Trismégiste.
La présence du Sel, du Soufre et du Mercure dans le Cabinet de Réflexion nous annonce que commence ici, par l'épreuve de la mort, de la Terre et de la décomposition, le travail de la création d'une Pierre philosophale qui n'est pas l'impétrant, mais l'initiation elle-même.
Le Miroir : La présence d’un miroir dans le Cabinet de Réflexion ne se justifie pas en référence à la formule « Connaît toi toi-même ». Mais plutôt pour faire prendre conscience à l’impétrant que ce qu’il perçoit n’est qu’un reflet, et qu’il faut aller au-delà des apparences pour découvrir ce qui véritablement « est ». Peut-être pourrait-il capter la lumière solaire et faire naître le Feu ? Le Miroir est un symbole essentiel de l’alchimie car il désigne le Mercure.
Pain et Eau : L’eau de la cruche et le pain doivent être considérés autant comme les nourritures de base dont l’âme a besoin que comme les éléments de construction de l’être : l’eau comme source de vie et le pain comme symbole alchimique représentant ici toutes les formes de transmutation (voir les textes des pyramides).
VITRIOL : Une formule alchimique « Visita interior Terrae Rectificando Invenies Occulthum Lapidem ». Le Lion Vert. Pourquoi cette formule se trouve t-elle dans le Cabinet de Réflexion et non dans le Temple ?
Parce qu'elle ne peut s'entendre que comme le programme de ce qui, commencé dans le cabinet de réflexion (la visite de l'intérieur de la Terre), se poursuivra (la rectification) et s'accomplira dans le Temple (la découverte de la Pierre cachée). Ainsi, tout au long de sa vie, la S:. Ou le F:. portera en lui ce mot VITRIOL qui le guidera sur le chemin.
Point de départ de la voie initiatique où est également préfigurée la totalité de son accomplissement, le Cabinet de réflexion, en tant que crypte ou caverne, évoque le sarcophage, que l’on place en terre afin que s’opère la transmutation de la Lumière.
Il faut maintenant franchir la Porte Basse pour retrouver l’athanor que représente la Loge et travailler sur son propre athanor pour réaliser le Grand Œuvre au cœur de Ma Mère…
Jakin,