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Titre du blog : Les Black's Foot
Auteur : Jakin
Date de création : 03-09-2008
 
posté le 15-02-2025 à 08:13:16

OEUVRONS DONC POUR QUE LA MATIÈRE PASSE DANS CHACUNE DES MAISONS DU SOLEIL - ŒUVRE AU BLANC

 
 
 


          Nous l'avons dit : l'Alchimie est un Arcane, il est donc incontournable de travailler sur soi-même, sur ses pensées. Et comment prétendre, pouvoir travailler sur les métaux avec de vieilles conceptions erronées ? Comment pouvoir prétendre transmuter les métaux sans être capable de transmuter ses pensées ? Si on y regarde bien, le principal obstacle dans cette science n'est pas l'obscurité des écrits, mais bien nos partis pris, nos préjugés, nos pensées déterminées ou plutôt prédéterminées.

Lors du dernier Conseil je vous ai fait voyager dans les secrets de l'Oeuvre au Noir. Abordons ce soir les mystères de l'Oeuvre au Blanc....

1 - La Fixation - Œuvre au blanc - élément Air : La coagulation dans l'œuvre au Noir et la fixation dans l'œuvre au Blanc sont les deux grands instruments de la Nature et de l'Art. La Fixation qualifie la manipulation qui change un élément volatil en une substance fixe. Elle désigne plus particulièrement une phase du Grand Œuvre, celle de la cuisson de la matière que la putréfaction a décomposée.

Mais c'est aussi dans le signe des Gémeaux que l’alchimie parle de la rosée de mai, le sel philosophique au moment où il se liquéfie, chaque cristallisation formant comme une goutte d’eau sous l’effet de l’humidité de l’air.

C’est un processus qui se produit vers le haut. Action ou opération par laquelle on rend fixe une chose volatile de sa nature. Le principe de la fixation est un sel fixe et la digestion à un feu convenable. Fixer, c’est changer un sel volatil en sel fixe, de manière qu’il ne s’évapore et ne se sublime plus. C’est aussi l’empêcher de redescendre ! La fixation est l’établissement des limites appropriées des trois principes ; Mercure, Soufre et Sel. C’est la suppression de la confusion sur les fonctions propres des trois principes.

Dans cet espace qui évoque la mythologie grecque, les Gémeaux sont associés à Castor et Pollux. Selon la légende, l'un est fils de Zeus (le roi des dieux), l'autre fils de Tyndare (le roi de Sparte). Ce sont des dieux jumeaux qui viennent en aide aux humains qui se trouvent dans des situations difficiles (Toumin). Situation que l'on retrouve dans le quatrième chapitre de la Genèse qui rapporte l’histoire d’Abel et Caïn, fils d'Adam et d'Eve. On retrouve aussi cette rivalité agriculteur/pasteur dans les mythes sumériens qui mettent en conflit Enmesh et Entan ou Lahar et Ashnan mais cette fois favorables au berger. Une façon de montrer du doigt la création du temps par le questionnement.

Cette Porte nous indique qu'il faut éveiller un souvenir. Quel  que soit le domaine de cette mémoire, il  s'agit d'une inscription positive dont nous avons besoin au moment du passage (Sivan). Il faut combattre avec Zãin dont le pictogramme est une épée flamboyante. Mais il s’agit d’une guerre intérieure, parce que la conscience vécue de l’Unité se conquiert (Amoriel). Elle nous délivre de la loi du talion "œil pour œil, dent pour dent" et rend la suprématie à la loi d’Amour (le pied droit).

2 - La Distillation - Œuvre Blanc - élément Terre : La distillation et la sublimation n'ont été inventées qu'à l'imitation de celles de la Nature à l'égard des éléments, dont l'inclination ou la disposition à se raréfier et s'élever, à se condenser et à descendre, font tous le mélange et les productions de la Nature. La distillation diffère de la sublimation, en ce que la première se fait par l'élévation des choses humides, qui distillent ensuite goutte à goutte, au lieu que la sublimation et l'élévation d'une matière sèche s'attache au vaisseau. L'une et l'autre sont vulgaires.

La distillation et la sublimation, philosophiquement parlant, sont une purgation, une subtilisation et une rectification de la matière. La coagulation et la fixation sont les deux grands instruments de la Nature et de l'Art.

Le procédé qui consiste à séparer le volatil des composés moins volatils. Le volatil de la matière emporte et fait monter avec lui le fixe. La distillation est le point capital de l’art, par lequel on peut extraire la quintessence. Il existe trois sortes de distillations :
- La distillation per-ascensum, le feu étant placé sous le vaisseau pour faire monter les psychés ; c’est le procédé le plus courant et il convient surtout à la distillation des matières spiritueuses et volatiles.
- La distillation per-latus par laquelle les psychés sortent de côté ; elle se fait par la cornue et convient aux matières denses qui contiennent des huiles lourdes et pour lesquelles il faut un Feu plus fort.
- La distillation per-descensum, le feu étant placé au-dessus du vaisseau chasse les psychés par le bas. Les Anciens l’estimaient parce que cette distillation détache les parties les plus tenaces des végétaux.

Dans cet espace qui évoque le Mythe de la déesse Déméter (la Déesse grecque des blés et des moissons), nous devons nous intéresser à la manière dont s'exprime la tension entre la séparation nécessaire et la séparation impossible (tel qu’il nous est donné dans les Hymnes homériques). C’est en mettant en évidence le rapport de Déméter à ce qui est de l’ordre de l’unité que sa confrontation à la séparation prend toute sa force (Le Prieur - Alchimie du blé doré/Betoulah).

Cette Porte nous aide à la promesse de cet accomplissement. Elle vient nous encourager et nous invite à être attentif : la graine a pris racine et l’Arbre est en train de se déployer. Même si le Chemin n’est pas terminé, la Grâce vient à notre rencontre et nous pouvons déjà pressentir la grandeur du corps de Lumière (Yod). Elle est un signe favorable pour toute activité créatrice, pour incarner et concrétiser une pensée divine. Comme il en est dans une œuvre artistique, l’artiste commence à créer, il pose le principe de son œuvre, mais après il n’en est plus le maître, c’est l’œuvre qui a une personnalité (Hellul). Elle s’empare du créateur et se fait avec lui.

3 - L'Incinération dans l'Œuvre au blanc - élément Feu : Au-dessus de la croix, ou creuset, s’élève la sphère ou granule, celle qui emprisonne Mars et Vénus - que les "opératifs" appellent rebis - et qui donne cette lettre G qui interpelle tant les Franc Maçons qui s’interrogent depuis des lustres sur la raison réelle de sa présence au centre de l'étoile à cinq branches, étoile flamboyante. Aucun symbole n’est aussi expressif pour illustrer le cinquième feu indispensable à la génération du soufre philosophique aérien dominant le creuset, formant ainsi l’idéogramme vénusien. Vénus est l’étoile flamboyante qui précède le lever du soleil, comme elle précède le Compagnon reçu dans une Loge.

Quand la croix domine le cercle comme dans le graphisme de l’antimoine et du cinabre, le cercle est toujours le soufre philosophique dont l’élément primordial placé au dessus n’est plus le creuset comme précédemment, mais les "larmes" qui permettent le blanchiment en cette phase appelée aigles par Fulcanelli. Elle consiste à sept adjonctions prudentes et mesurées aussi bien pondéralement que temporellement du nécessaire lait de Vierge (tiré de la rosée de mai après 40 jours de cristallisation aux ténèbres)...Et après on nous dira qu'il n'y a pas d'alchimie dans les Rituels maçonniques ?

Incinérer, c’est consumer par le feu. Action par laquelle on réduit un corps en cendres. L’incinération est comparable à une calcination philosophique sans l’élément fécondant. Elle produit une cendre qui sera plus tard – là est la différence - fécondée par un Soufre quelconque. Á moins que celle-ci soit utilisée comme un Sel, comme c’est le cas, par exemple, dans l’élixir végétal.

Dans cet espace qui évoque le Mythe du Centaure qui vit de l'autre côté du Styx (Chiron enfant de Cronos et l'un d'eux), nous sommes confrontés à ces créatures hybrides car les Centaures ont en eux une part d’animalité qui l’emporte sur leur part d’humanité. En tant que tels, ils représentent les pulsions de violence et de concupiscence, autrement dit la bête qui sommeille en l’homme (Kéchet). En effet, le plus célèbre des centaures, Chiron (centaure immortel), est réputé pour sa sagesse et fut le tuteur des plus grands héros grecs : Achille, Jason, Héraclès pour ne citer qu’eux. Un jour où Héraclès chassait les centaures du mont Pélion, il tira par mégarde une flèche empoisonnée sur Chiron. Le centaure ne pouvait pas en mourir, mais le poison lui donnait de terribles douleurs. Afin d’y mettre fin, Chiron demanda à mourir à la place de Prométhée, condamné par les dieux pour avoir donné le feu aux hommes ; ce qui lui fut accordé.        

Cette Porte nous signifie qu'il est temps de souffler et de se ressourcer. Peut-être nous sommes-nous laissés happer par l'engrenage du tumulte quotidien ? Peut-être avons-nous oublié l'indispensable rendez-vous avec notre Etre de Lumière, dans l'instant présent ? Il faut alors consacrer le temps nécessaire pour prendre du recul, faire le point, retrouver son sanctuaire intérieur, goûter le silence, revenir à l'essentiel (Samech/ Adnachiel).

Le chemin n'est pas terminé, mais il faut apprendre à en apprécier chaque étape, ne pas rechercher la perfection immédiate, mais Accepter d'être un enfant qui retrouve la joie, parce qu'il se sent en parfaite sécurité, accompagné par ses Parents divins (Kisler).

4 - La Multiplication - Œuvre au Blanc - élément Eau : La multiplication est l’acte par lequel on augmente en quantité ou en vertu. La multiplication en quantité, c’est le procédé par lequel l’alchimiste augmente en quantité l’élixir ou la pierre obtenus. La multiplication en vertu, c’est le procédé par lequel l’alchimiste augmente l’efficacité (la force active, la puissance transmutante) de l’élixir ou de la pierre obtenus. Aussi Ripley compare-t-il la multiplication au feu, d’où l’on peut tirer de quoi allumer bien d’autres feux.

Le Chevalier vient de passer la dernière Porte et dans cet espace on devine le Grand Oeuvre (Art Royal). La Pierre Philosophale comme le chemin parcouru consiste à découvrir l’absolu et l’Art de la science hermétique. Pour parvenir à cette Pierre Philosophale il faut pratiquer l’analogie des contraires, cette voie du juste milieu qui est un retour à l’homogène, comme lorsque Caïn et Habel était unis en tant que frères jumeaux. Ici encore nous devons nous reporter à cette loi d’Hermès énoncée dans la Table d’Emeraude :"Tout ce qui est en haut est en bas, et tout ce qui est en bas est en haut".

Cette dernière Porte symbolise la fin et le début d’un nouveau cycle, l’alpha et l’oméga. Elle demande un sacrifice, une sorte de prix à payer pour que le Chevalier qui l’occupe se déleste de son matérialisme afin d’entrer dans une dimension plus universelle. Le passage indique les illusions et les déceptions, les dépressions et les refuges. Dans l’ésotérisme, c'est une porte qui fascine par son mystère, elle purifie le karma négatif de chaque personne et elle indique l’évolution spirituelle par l’intermédiaire de l’équilibre.

Celui qui accède à la Sagesse est celui qui ferme ses sens au monde extérieur pour être entièrement réceptif au Divin. C’est l’initié qui est hors de ce qu’on appelle la dualité. Il n’y a pas vérité ou non vérité, il est cherchant, en quête d’harmonie intérieure. Être réceptif au Divin c’est donc être capable de recevoir, d’accueillir. La lumière se révèle parfois là où l'on s'y attend le moins.

Dans la matière la plus noire, dans les circonstances difficiles de la vie, une main d'Amour nous est tendue. Le Grand Oeuvre peut alors commencer et Le Chevalier de l'Aigle Rouge doit s'y atteler.

En conclusion : Á une époque où les certitudes que l'on croyait bien établies s'effondrent, où l'individu est en recherche de spiritualité et où tout ce qui fait rêver est à la mode, l'alchimie, école de pensée universelle, peut être une voie de méditation et d'éveil aussi valable que le yoga, duquel elle se rapproche en ce qu'elle fut et reste une technique et une mystique, agissant mêmement sur le corps et l'âme, l'esprit et la matière, l'homme et le cosmos.

L'alchimiste est conscient qu'il cherche à réaliser ce que la nature opère elle-même. La mort n'est-elle pas séparer une chose d'une autre, libérer l'esprit, le rendre à l'âme universelle, à la perfection et accéder ce faisant, à la perfection ? La transmutation n'est-elle l'origine de la diversité des êtres et des choses ? La création du monde n'est-elle pas une séparation ? " Dieu ouvrit le livre de la nature et sépara la lumière des ténèbres, puis il sépara les eaux qui étaient en dessous" , est-il dit dans le livre de la Genèse.

Solve et Coagule : "dissous et fixe", "sépare et réunis", réaliser le Grand Oeuvre c'est faire apparaître le divin qui est en l'homme. C'est faire en quelque sorte sont salut en ce monde, c'est réaliser l'harmonie complète, unifier son être, en le délivrant de ses impuretés. Mais cette délivrance n'est pas une évasion, c'est une nouvelle naissance, celle du règne de l'homme achevant par l'art l'œuvre de la nature, et recomposant l'œuvre du créateur.

En cela, l'alchimie est bien une morale...

Jakin,