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Titre du blog : Les Black's Foot
Auteur : Jakin
Date de création : 03-09-2008
 
posté le 04-09-2008 à 05:03:25

A LA RECHERCHE DU VASE....

 

         Au cœur de ses 6 visages pleins de vie et de surprises : Soissonais, Laonnais, St Quentinois, Thiérache, Marne et Serre nous partons à la découverte du département de l’Aisne situé en Région Picarde. A proximité de Center Parcs, nous découvrons l’Histoire de la Première Guerre Mondiale avec le Chemin des Dames et la Caverne du Dragon. Haut lieu du souvenir, l’Aisne est aussi terre d’architecture : cathédrales, abbayes, moulins… ont inspiré les plus grands noms de la littérature et de la peinture dont La Fontaine, Racine, Dumas, les Claudel ou Matisse…

        Huit heures de route sont nécessaire pour inspirer l’air pur et expirer le quotidien entre collines et campagne. Le corps et l’esprit peuvent se ressourcer. Sur les routes de campagne qui serpentent les vallons verdoyants, on se laisse surprendre au détour d’un chemin par l’imposante silhouette des Dames Rouges, ces églises fortifiées entourées par de charmants villages…


        Nous avons pris nos quartiers pour sept jour à l’Hostellerie Saint Vincent, un établissement de la chaîne « Citotel » managé par Cécile. Un accueil convivial et chaleureux par une équipe jeune et dynamique dans un cadre aéré et lumineux. Une carte variées avec quelques produits régionaux, une chambre spacieuse avec une baignoire balnéo complètent aisément le séjour…

        Pour y arriver c’est tout droit en haut : Autoroute A7 jusqu’à Vienne, puis contournement de Lyon, direction Genève puis Reims – sortie 13 Laon. On quitte l’autoroute pour la nationale 2, on traverse Chambry, au rond-point première sortie à droite, on longe la départementale 181 jusqu’au centre commercial champion, deux fois à droite et une belle pelouse qu’encadre un vaste parking est là pour nous accueillir…
     
            « J’ai quitté Laon ce matin, vieille ville avec une cathédrale qui est une autre ville dedans, une immense cathédrale qui devrait porter six tours qui n’en a que quatre ; quatre tours presque byzantines, à jour comme les flèches du 16ième siècle. Tout est beau à Laon, les églises, les maisons, les environs, tout… » : Victor Hugo, le 1er août 1835. Alors, comme Victor Hugo, allons voir si tout est beau !…
     
            La Lugdunum des Gaulois marque son entrée dans l’histoire par Saint Rémi, Charlemagne et Roland de Roncevaux. Camaïeu de pierres grises entouré de verdure, cité touchante avec ses ruelles, ses portes fortifiées et ses légendes, sa ceinture de remparts s’enroule autour d’elle pour préserver jalousement son passé. La montagne couronnée nous accueille pour nous séduire. Ouvrons les yeux pour bien la découvrir…
     
            La cité historique a conservé son aspect médiéval. La majestueuse cathédrale, la chapelle des Templiers et près de 80 monuments historiques nous plongent dans le passé. La cuve Saint Vincent et ses pentes verdoyantes apportent une touche bucolique à cet ensemble architectural de premier plan. La Cathédrale, chef d’œuvre du 1er âge gothique a inspirée de nombreuses autres cathédrales (chartres, Reims, Lausanne)…
     


            Dès le Moyen Age, les tours de la cathédrale de Laon forcent l’admiration des plus grands, tel Villard de Honnecourt, maître d’œuvre du 13ième qui écrira : « Je suis allé en de nombreux pays comme vous pouvez le constater dans ce livre, et en aucun lieu je ne vis des tours comme celles de Laon ». C’est le moine Guibert de Nogent qui rapporte cette légende : « un attelage ne pouvant arriver à gravir la colline de Laon pour amener à pied d’œuvre les matériaux, un bœuf mystérieux apparut pour renforcer l’attelage et disparut subitement quand le chariot eut achevé sa pénible ascension ». C’est en souvenir de ce miracle que les colossales figures de bœufs ornent les tours de la façade occidentale de la cathédrale Notre Dame de Laon…
     
            Vers les onze heures, un petit train touristique nous permet de croiser la plupart des monuments de la ville et même de goûter les panoramas de ses alentours. Une autre façon de parcourir la cité médiévale. La visite se termine à Midi devant un petit restaurant italien « La Dolce Vita », nous poussons la porte avec envie…
      


            Direction les Vestiges du Château fort de Coucy : les ruines s’étalent sur un éperon qui domine la vallée de l’Ailette. Un inoubliable panorama se découvre aux pieds de ses interminables murailles qui témoignent de l’orgueil des seigneurs bâtisseurs. L’histoire remonte à l’époque de Clovis. La légende raconte que le Roi des Francs, ayant gagné la bataille de Soissons, offrit à Saint Remy, évêque de Reims, tout le territoire qu’il pourrait parcourir durant sa sieste. C’est à Enguerrand III que l’on doit le château et l’enceinte urbaine actuels, datés de la première moitié du 13ième siècle. Le château est composé de trois parties. Nous rentrons tout d’abord dans la ville haute, ceinturée de deux kilomètres de courtines, par une des trois portes fortifiées qui y donnent l’accès…
     
            On pénètre ensuite dans une basse cour de trois hectares, entourée d’une enceinte flanquée de dix tours, avant de franchir le fossé, entourant les ruines du donjon. Le château lui-même, comporte quatre grosses tours reliées entre elles par des corps de bâtiments. On y découvre les salles basses des tours, le grand cellier et les logis des Preux et des Preuses…
     


            Avant sa destruction en 1917, le donjon était la plus grosse tour d’Europe : 54 mètres de haut, 31 mètres de diamètre, 7,5 mètres d’épaisseur moyenne des murs à la base…
     
            Un vignoble coucyssien existait au Moyen Age, implanté sur les coteaux bordant la forteresse : il avait à l’époque une bonne réputation. Les efforts de réimplantation accomplis ces dernières années, outre qu’ils permettent au site de retrouver sa vérité historique et de dégager le champ de vision pour mieux découvrir le monument, devraient bientôt (nous dit-on) produire un vin de qualité. A ce jour, 1700 pieds de vigne ont été replantés sur cette côte…
     


            Nous clôturons notre première journée de visite par le Chemin des Dames. Les filles de Louis XV lui ont donné son nom. La Grande Guerre l’a rendu tragiquement célèbre. Le Chemin des Dames invite au souvenir depuis les ruines du village de Craonne jusqu’au musée poignant de la Caverne du Dragon, une des nombreuses carrières souterraines ayant servi aux combattants pendant la Première Guerre Mondiale. Cette crête est le point de départ de nombreux sentiers de randonnée permettant de découvrir l’arboretum de Craonne, les ruines de l’abbaye de Vauclair ou les creuttes, cavités rocheuses habitées dès les temps préhistoriques…
     
            Le temps est toujours gris ce matin, mais il ne pleut pas. 50 kilomètres nous séparent de la ville de Soisson. Sur la route nous apercevons les charmants villages de pierre blanche blottis autour de leur église romane. Des vendangeoirs y rappellent le riche passé viticole de la région. Monts et collines boisés se succèdent et leur beauté naturelle nous invite à nous promener dans la campagne…
     


            Capitale du Royaume des Francs et cité du célèbre vase, Soisson et son pays furent une source d’inspiration pour certains des plus grands écrivains de l’Aisne comme Racine, Dumas ou Hugo. Tous furent charmés par le caractère authentique des châteaux, cathédrales ou abbayes du soissonnais. La ville choisie par Clovis comme première capitale du Royaume des Francs est bâtie sur les bords de la rivière Aisne. Elle domine un pays de vastes plateaux céréaliers et de vaste massifs forestiers tels que la forêt de Retz. C’est de cette terre riche en calcaire que sont tirées les magnifiques pierres de taille blanche…
     
            Quant au vase de Soisson qu’un soldat envieux et impulsif frappa de sa hache en criant à Clovis : « Tu ne recevras que ce que le sort te donnera vraiment », nous l’avons retrouvé dans les coursives de l’ancienne Abbaye St jean des Vignes fondée en 1076 sur la colline Saint-Jean pour des chanoines réguliers suivant la règle de Saint Augustin, l’abbaye est le monument le plus spectaculaire de la ville…
     


            D’abord de style roman, les bâtiments sont remplacés à la fin du 12ème siècle par ceux que l’on voit aujourd’hui : la façade (12ème – 16ème siècle), le réfectoire et le cellier (13ème siècle), deux galeries du grand cloître (fin 13ème siècle), une galerie d’un petit cloître de style Renaissance et le logis abbatial (16ème siècle).
     
            Située place du Cardinal Binet, en plein cœur de la ville, la cathédrale fait partie des sept cathédrales gothiques de Picardie. Commencée à la fin du 12ème siècle, sa construction s’étend sur deux siècles.
     


            Le bras sud du transept est un exemple remarquable du premier édifice de style du premier art gothique à quatre niveaux construit à partir de 1175. La façade, inachevée et mutilée à plusieurs reprises, s’ouvre sur le vaisseau central qui illustre le style gothique classique.
     
         Fortement endommagée pendant la Première Guerre mondiale elle possède un patrimoine mobilier remarquable : l’Adoration des bergers de Rubens, le portail de la sacristie de Michel-Ange Slodtz, des vitraux de Raphaël Lardeur.
     


        La reconstruction du centre ville après la Première Guerre mondiale isole aujourd’hui cet édifice. La place Fernand Marquigny met en valeur ses parties orientales. La nouvelle place Mantoue laisse imaginer l’espace autrefois réservé aux jardins de l’ancien évêché. Le square Saint-Pierre garde le souvenir d’un des plus grands monastères féminins du nord de la Gaule : l’abbaye Notre-Dame. Fondée entre 659 et 666 elle comprenait trois églises : Saint pierre au parvis, Sainte-Geneviève (disparue) et Notre-Dame. De cette abbaye détruite à la Révolution française il reste la façade et les trois premières travées de la nef de l’église romane du 12ème siècle, l’église Saint-Pierre, où en 1953 a été inauguré un monument de la déportation…
     
            Une averse interrompt notre visite, nous reprenons la voiture pour nous mettre à l’abri sous terre à quelques kilomètres d’ici. Le fort de Condé sur Aisne appartient au système Séré de rivières destiné à défendre la nouvelle frontière de 250 km, de Longwy à Belfort, issue du traité de Francfort de 1871 qui met fin à la guerre franco-allemande de 1870-1871. En forme de pentagone, il est un élément de seconde ligne de la fortification La Fère - Soissons.
     


            Le fort couvre 13 hectares et peut accueillir jusqu'à 650 hommes dont 20 officiers. Une infirmerie peut abriter 80 malades. L'écurie est prévue pour 12 chevaux, des magasins à poudre et à munitions, une forge un atelier à bois et deux puits occupent les autres parties aménageables. Protégé par un fossé de huit mètres de large, ce fort dispose de 18 plate-forme d'artillerie. En 1888 l'armement comprend quatre canons de 155 long, quatre de 155 court, dix-neuf de 120, quatre mortiers de 15 cm et plusieurs canons revolver et canons de 12 culasses…
     
            Comme il pleut toujours, nous retournons sous terre quelques kilomètres plus loin. En pénétrant dans la Caverne du Dragon, nous espéreront entendre le son des burins des tailleurs de pierre, bâtisseurs de cathédrales, ou le pas des chevaux du carrosse des filles de Louis XV passant sur le Chemin des Dames. Mais ce ne sont que les plaintes des combattants pris sous la mitraille se réfugiant dans cette forteresse souterraine qui montent à nos oreilles…
     

 
            Le réseau de galeries de la caverne nous plongent dans la vie quotidienne et l’intimité du soldat sur le front et en dessous. A l’origine une carrière de pierre creusée dans le calcaire. Située sous le Chemin des Dames, cette creute est transformée en véritable caserne par les Allemands qui l’occupent en janvier 1915 et lui donne le nom inspiré par la mythologie germanique. Ainsi naît la « Drachenhöhle » ou Caverne du Dragon. La scénographie au service de l'Histoire… La Caverne du Dragon a subi plusieurs aménagements architecturaux et artistiques pour mettre en valeur l'originalité du site. De l'ombre des parois à la lumière portées par les écrans, panneaux, vitrines, nous foulons un sol éclairé par des jeux de lumière. A chaque étape du parcours, un morceau de l'Histoire raconté sous plusieurs angles : géographique, social, militaire…
     
          Au détour des salles souterraines, nous découvrons pas à pas les différents espaces portant l'histoire et le vécu des soldats de la Grande Guerre. De multiples supports nous accompagnent dans notre découverte des témoignages et de l'histoire de la Guerre de 14-18 : audiovisuel, panneaux didactiques, objets artisanaux, fond photographique. Autour de soi, les murs de calcaire évoquent le souvenir des espaces aménagés pendant la Grande Guerre : Chapelle, cimetière, puits, hôpital…
     


        Comme la pluie à cessée provisoirement, nous partons vers l’intérieur de la campagne pour visiter l’Abbaye de Vauclair qui clôture notre journée dans le Soissonnais. L’abbaye appartient à l’ordre qui tire son origine de l’abbaye de Cîteaux. Celle-ci fut fondée en 1098, par un groupe de moines de l’abbaye bénédictine de Molesme, avec l’intention de pratiquer la règle de Saint Benoît dans toute sa pureté primitive, en rejetant tout ce qu’au cours des siècles on y avait ajouté d’adoucissements, en particulier en ce qui concerne les jeûnes et le travail manuel. Ces moines vinrent se fixer dans la forêt de Cîteaux, à quelques vingt kilomètres au sud de Dijon, et mirent leur projet en pratique, vivant du travail de leurs mains, pauvres – comme ils disaient – avec le Christ pauvre.
     
        Saint Bernard fut placé à la tête de Clairvaux comme premier abbé. Sous sa direction l’abbaye devient bientôt célèbre comme l’un des hauts lieux de la chrétienté. Les recrues y virent en foule et, du vivant même du Saint, l’abbaye fonda plus de soixante monastères à travers toute l’Europe, parmi lesquels Vauclair est le quinzième en date. Ces monastères essaimèrent à leur tour, si bien qu’à la mort de Saint Bernard, en 1153, après trente-huit ans d’abbatiat, la filiation de Clairvaux comptait cent soixante-huit monastères. Fait unique dans l’histoire monastique.
     


        A l’Est de la salle des moines, les fouilles ont permis de mettre au jour les fondations des anciennes infirmeries monastiques. C’est l’emplacement traditionnel de ces bâtiments qui jouaient un rôle important. Ils ne servaient pas seulement au soin des malades mais à la vie quotidienne des moines âgés qui ne suivaient plus le régime régulier. La tradition a gardé le souvenir de l’ancienne apothicairerie monastique de Vauclair et de son jardin des plantes. Pour marquer cet emplacement et perpétuer ce souvenir, le Groupe "Sources" y a implanté en 1976 un jardin de plantes médicinales accessible aux visiteurs. La disposition en damier est conforme aux plans des premiers jardins monastiques, tel que celui de l’abbaye de Saint-Gall au IX’ siècle. A l’heure actuelle, ce jardin regroupe 400 espèces de plantes médicinales. Les spécialistes le considèrent comme l’un des plus riches de France…
     
         Nouvelle journée grise, mais nous en avons pris l’habitude ! Cette fois-ci nous partons pour le Saint-Quenntinois apprécier toute la beauté de l’architecture, observer l’abondante faune et flore du marais d’Isle… Comme Maurice Quentin de la Tour, nous laissons les couleurs pastel nous inspirer !…
     


           Notre première visite est pour la ville de Guise. Dès le 12ième siècle, cette place forte frontalière fut assiégée des dizaines de fois par des ennemis venus de toute l’Europe. Sans cesse agrandie et améliorée, elle résista jusqu’au 20ième siècle. Ses hautes murailles surgies de la terre de Thiérache témoignent ainsi, au fil des siècles et des batailles, d’une partie de la « mémoire d’Europe ». Aujourd'hui, autour du donjon, les salles d'armes, les souterrains, les galeries et pas moins d'1 km de murailles font de ce site une véritable "cathédrale militaire"…
     
       Au cœur du château, le musée archéologique, des visites guidées, des ateliers pédagogiques, des expositions, des animations en costume et des "Camps chantier Patrimoine" font revivre le site en permanence…
     


        C’est aussi la ville de Camille Desmoulins, cet homme politique et journaliste engagé qui participa avec ferveur aux journées insurrectionnelles de juillet 1789 qui entraîna la prise de la Bastille. Tout au long de sa vie, il exprima son hostilité à l’égard de l’Ancien Régime puis des Girondins et enfin du régime de la Terreur par le biais de pamphlets. Arrêté par le Tribunal révolutionnaire, il fut guillotiné aux côté de Danton en avril 1794…
     
        Un autre personnage fait la renommé de cette petite ville : Jean Baptiste André Gaudin. En appliquant la fonte aux appareils de chauffage, Jean Baptiste invente le… poêle Godin dont le succès lui permet de créer un palais social qui s’inspire du phalanstère de Fourier.
     


       Le familistère, ville dans la ville est édifié de 1859 à 1892. Le confort et les conditions de vie y sont exceptionnels pour l’époque. L’industriel crée un pouponnât, développe l’école gratuite, mixte et laïque, bâtit dans son palais un théâtre, une bibliothèque, une buanderie piscine. On découvre ce patrimoine exceptionnel, témoin d’une « utopie réalisée » et mis en valeur dans le cadre d’un programme muséographique justement appelé Utopia…
     
         Il est temps maintenant de nous laissez emporter par la brise flamande qui souffle sur Saint Quentin et ses alentours ! La capitale nous offre ses plus beaux trésors d’art flamand avec sa « Grand Place » et ses merveilles insufflées par divers courants artistiques tels que l’art gothique ou encore l’art déco. Les charmes de la ville où la tradition textile demeure ont inspiré le Maître du pastel Maurice Quentin de la Tour ainsi que Matisse, avec ses rendus de tissus imprimés et étoffes multicolores présents dans ses œuvres…
     


           ...Les fondations de la basilique remontent aux origines même du Christianisme dans la région. En effet Eusébie, dame romaine, qui ayant retrouvé le corps de Saint Quentin (fils d'un sénateur romain venu en Picardie prêcher le christianisme puis décapité). Il fut construit au dessus du tombeau du saint un oratoire. Cette chapelle successivement restaurée, démolie puis reconstruite chaque fois dans des proportions toujours croissantes, devint la Basilique que nous visitons aujourd'hui.
     
          ...C'est à l'endroit même où saint Quentin subit son martyre que la dame romaine lui donna la sépulture après avoir retrouvé son corps immergé dans la Somme pendant cinquante ans. Ce ne fut d'abord qu'un modeste oratoire, qu'il fallut bientôt agrandir en raison de l'affluence des pèlerins. Les évêques de la cité du Vermandois l'élurent comme siège et comme cathédrale. De nouveaux embellissements lui furent apportés par saint Éloi, qui venait de découvrir le tombeau de saint Quentin. Détruite par les invasions, l'église fut reconstruite entièrement par Fulrad, chef du clergé de Saint-Quentin, grâce aux libéralités de Charlemagne, et consacrée par le pape Étienne IV ; le 2 août 816, les normands l'incendièrent…
     


         Elle fut relevée de ses ruines vers 942. Enfin, au début du douzième siècle, alors que se bâtissaient les cathédrales de Laon et de Noyon, les chanoines de Saint-Quentin résolurent de se donner une basilique plus vaste et plus belle encore, qui est la collégiale actuelle. Sa nef ne fut toutefois achevée qu'en 1470 et reliée alors à la tour Saint-Michel, datant du douzième siècle, qui sert de clocher. Trois grands incendies devaient l'éprouver : en 1545, en 1557 pendant le fameux siège, et en 1669. Pendant la Révolution, les Jacobins la mutilèrent et la transformèrent en temple de la Raison, puis en magasin à fourrage et en écurie. En 1871, lors de la bataille du 19 janvier, elle reçut dix-huit obus, qui causèrent quelques dégâts. Mais la grande guerre allait lui réserver d'autres injures…
     
        Jusqu'au 1er juillet 1916, la basilique fut épargnée par la guerre. Mais à cette date, un avion, français ou anglais, survolant la gare, fit sauter un wagon d'explosifs, ce qui provoqua une catastrophe effrayante : des maisons furent éventrées et incendiées, des bateaux coulés ou détruits sur le canal, des Allemands tués ou blessés par centaines. La ville entière avait été ébranlée et sept des grandes fenêtres de la nef ou du chœur de la cathédrale furent brisées…
     


        Aujourd’hui le temps s’est aggravé, il pleut à verse et sans interruption. Nous enfilons un habit de grenouilles ou d’escargots, au choix, et décidons d’affronter une nouvelle fois la cité médiévale. Dans l’ordre de marche : Porte de Soisson évoquant l’architecture militaire du 13ième siècle, flanquée de deux grosses tours avec archères. La ruelle Pourier ou se dresse la doyenne des maisons du Laon avec ses cheminées rondes…
     
        Couvent des Dames de la Congrégation construit en 1624 à l’initiative de Philibert de Brichanteau, évêque de Laon, le couvent fut transformé  en prison de 1831 à 1970. Petit Saint Vincent, refuge de l’abbaye du même nom située hors des murs de la ville, servait d’hospice aux pèlerins et de refuge aux religieux lors des invasions. Petit Saint Nicolas qui servait luis aussi de refuge aux moines de l’abbaye Saint Nicolas aux Bois en forêt de Saint Gobain. L’église abbatiale Saint Martin seconde en dignité de l’ordre Prémontré, fondée par Saint Norbert en 1120, la vaste église abbatiale du 12ième siècle démontre une architecture d’influence cistercienne…
     


        Logis abbatial Saint Martin en brique et pierre, le logis comprend un élégant pavillon d’agrément « le vide bouteilles ». Place de l’Hôtel de ville : en 1831, le palais royal médiéval de Louis VII le jeune et le donjon de Philippe Auguste furent détruits pour construire l’actuel hôtel de ville et sa place, ce qui fit écrire à Victor Hugo « Tout est beau à Laon, mais je n’ai jamais rencontré de conseil municipal aussi bête »…
     
        Ancien Relais de Poste créé en 1683, en 1770, au cours d’une rixe, le chevalier d’Espinay y trouva la mort. Rempart Saint Remy : on y aperçoit la plaine et sur la droite la forêt de Samoussy où selon la légende Pépin le Bref et Berthe au Grand Pied conçurent Charlemagne…
     


        Au environ de Midi, nous sommes obligés de retourner à l’hôtel pour nous changer afin d’être présentable pour le déjeuner. La « Dolce Vita » nous propose une salade tomates mozzarella suivie d’un plat de peines sauce tomate basilique, le tout arrosé d’un chianti salvateur. Après le café expresso, pas question de retourner sous la pluie, nous décidons de visiter les souterrains de la ville.
 
      L’extraction de la pierre a donné naissance à plusieurs centaines d’hectares de souterrains sous la cité médiévale. L’extraction a probablement commencé sur le pourtour du plateau, là où le banc affleure et est donc facilement exploitable. L’exiguïté du plateau, sa faible largeur et la détérioration de terrains constructibles couplées à la nécessité d’avoir un rempart a contraint les carriers à s’enfoncer dans le sous-sol par l’intermédiaire d’entrées en cavage. L’exploitation se faisait alors en souterrains. Les carriers avancent à l’horizontal, exploitant 2 ou 3 bancs suivant la roche en place.
     


           Les souterrains " perchés " ont été utilisés au lendemain de la guerre de 1870. La France s’est dotée d’une nouvelle ligne frontière au travers d’un programme d’édification d’ouvrages défensifs répartis sur l’ensemble des limites nationales et regroupés sous l’appellation de leur concepteur Mr Séret de Rivière. Si l’on garde à l’esprit que les vides dus aux carrières, poussés horizontalement, débouchent au pied des remparts et dominent donc la plaine ceinturant le plateau, on comprend le paradoxe qui a permis la construction de ces édifications défensives dont la plus singulière est la Batterie Morlot. Batterie défensive qui est en fait un télégraphe optique permettant de correspondre avec les forts environnants…
     
      Ce matin nous partons pour le bocage Valois, dans ce poumon vert où résonne encore les chevauchées des mousquetaires chers à Dumas. Le temps est toujours gris avec des nuages menaçants. Nous avons rendez-vous à Silly la Poterie vers 11h30 pour une croisière sur l’Ourcq. Sur la route nous croisons un magnifique moulin encore en fonctionnement qui se détache sur une étendue de vert.
     


        Notre premier arrêt sera pour la ville natale de Jean Racine : La Ferté Milon. Un village typique du bocage avec son écluse sur l’Ourcq. Le château de Louis d’Orléans construit en 1375 domine la ville sur sa droite. Après 1392-1393, le prince fait débuter l'énorme chantier de la Ferté. Il termine parallèlement le château de Pierrefonds. Son assassinat par des sicaires à la solde de Jean sans Peur, duc de Bourgogne, le 23 novembre 1407, vient mettre un coup d'arrêt définitif aux travaux. Le rêve de Louis d'Orléans reste inachevé. La place se révèle toutefois suffisamment puissante pour soutenir victorieusement un siège en 1423.
     
        A l’extrémité nord L'église Saint Nicolas de la Chaussée apparaît extérieurement de style Renaissance. Son clocher est surmonté de quatre tourelles de guet mais est dépourvu de son dôme primitif qui, détruit lors d'un orage, fut remplacé par une petite flèche en ardoise. Commencée en 1460, cette église fut achevée et dédicacée en septembre 1491. Mais l'intérêt principal de cette église réside en un superbe ensemble de huit grandes baies gothiques garnies de vitraux du 15ième  siècle, sauf un. Certains d'entre eux sont datés de  1542-1549-1598. Ils furent sauvés une première fois de la Révolution par le Sacristain Dubois, qui les blanchit à la chaux pour les dissimuler, et une seconde fois par le Chanoine Devigne, qui put les faire démonter avant les bombardements de juin 1918.
     


        Sur les rives de l'Ourcq et de son canal, le centre-ville propose la promenade du "Mail" où l'on accède par un pont métallique construit par Gustave Eiffel. De chaque coté de ce pont et de la tour appartenant à l'ancienne enceinte, on peut voir les jardins de la propriété des Sconin, aïeuls de Jean Racine et ceux de la propriété Héricart où s'est marié Jean de La Fontaine. Les vieilles maisons, les chaussées anciennes, tout concourt à nous rappeler que cette bourgade inspira de nombreux peintres, tels Corot et son élève Eugène Lavieille.
     
        Il est temps de rejoindre Silly la Poterie que nous traversons pour rejoindre trois kilomètres plus loin le port fluvial de Port aux Perches ou nous attend le capitaine du « Clygnon »  pour une croisière avec repas de trois heures sur la rivière Ourcq…
     


            L’Ourcq, La Rivière des Ducs... Prend sa source à Courmont, dans l'Aisne, elle fut canalisée sous François 1er à partir de Port aux Perches. Le capitaine nous place à bord et nous invite à naviguer en suivant les méandres de la Rivière aujourd'hui praticable uniquement entre Port aux Perches et Mareuil sur Ourcq. Dès les premiers tours d’hélice, un marin nous sert un kir maison avec ses craquottes puis le capitaine nous raconte l’histoire du canal et des écluses que nous allons franchir ensuite le repas commence par une glissade de saumon fumé, suit un suprême de pintadeau forestier, pommes persillées et flan de légumes, le brie de Maux sur un lit de salade, accompagné d’un blanc et d’un rouge de Bordeaux servit à discrétion…
     
        Aux abords de la forêt de Retz, nous traversons la ville de la Ferté Milon, surplombée par les rustres murailles du château des Ducs d'Orléans, et franchissons son écluse sur les traces de Jean Racine. Les tours moyenâgeuses de la ville vous saluent, comme la tour carrée de l'église Notre-Dame où résonne encore le chant des cloches célébrant le mariage de Jean de La Fontaine, ou comme ses maisons de pierre blanche, son ancien moulin à aube, les tilleuls de son mail, le reflet de ses jardins dans l'eau qui lui donnent le charme du temps arrêté.
      


        Entre le fromage et la tarte normande avec sa crème anglaise et avant le café, nous glissons jusqu'a Marolles où une halte de charme s'impose. C’est l’occasion de découvrir la vie autour d’une écluse, un vieux lavoir, quelques maisons anciennes et une petite chapelle du 14ième siècle se découvrent en passant un pont étroit au pied d’un immense peuplier. Au coup de sirène nous reprenons la navigation pour surprendre les hérons cendrés, et les poules d'eau en remontant le courant en retrouvant l'ancienne gare fluviale à l'extrémité du réseau de l'Ourcq, au parc de Port aux perches.
     
        Pour finir notre journée de découverte dans le bocage nous partons pour le site de Septmonts. La tradition orale dit que le Pape Jean VIII de passage en ce lieu, lui aurait donné ce nom en pensant à Rome, la ville aux sept collines. On en trouve une trace écrite latine : Septem Montes à compter du 12ième siècle, date à partir de laquelle les évêques de Soissons y eurent une résidence. Simon de Bucy évêque entre 1362 et 1404, soucieux de protéger les populations dans la période d'exactions que le pays traversait alors, donne au château sa configuration actuelle de forteresse.
      

 
           Le château est le fleuron du patrimoine de Septmonts. Edifié par un architecte des équipes royales de Charles V, il est dans le style des châteaux princiers du 14ième siècle, mariant avec élégance l'art défensif militaire et celui de "l'hostel" résidentiel. Le donjon symbole de puissance, de luxe, et d'ostentation est d'allure fort peu féodale, c'est un chef d'œuvre empreint tout à la fois de force, de majesté, et de grâce…
     
          Pour notre dernière journée dans le département nous partons pour le poumon vert de l’Aisne : la Thiérache. Surnommée affectueusement la Petite Normandie elle séduit grâce à ses douces collines et à ses verts bocages bucoliques. Au milieu de villages pittoresques se dressent d’imposantes églises fortifiées, joyaux de l’architecture locale. Et pour les papilles, il faut céder à la tentation du maroilles, goûteux formage à la croûte orangée…
     


        Au cœur de la verdoyante Thiérache, entre Serre et Oise, ce sont plus de soixante cinq églises fortifiées qui profilent leur silhouette austère sur les villages qu’elles semblent toujours protéger comme Vervins que nous visitons.
     
       Les villages de Thiérache, devaient subir les “ courses ” régulières venues de la frontière proche, raflant le bétail et prenant des otages, les incursions de petites bandes armées de soldats ou de déserteurs qui ne pouvaient subsister que par le pillage. Donc, pas de grandes batailles, mais la nécessité quasi-permanente pour les populations de protéger leur vie et leurs biens.
     


           Telles quelles, les Églises Fortifiées représentent “ apparemment ” un archaïsme curieux, mais dont l’existence et la conception étaient, en fait, bien adaptées au milieu et aux circonstances de cette époque difficile. Leur densité, en Thiérache, et leur origine communautaire leur confèrent un réel intérêt touristique qui reste à découvrir…
     
        A l’approche de Marle, notre deuxième étape, on aperçoit de loin le clocher de l'église. Bâtie au début du gothique, elle est le monument le plus imposant de la cité. Son portail abrite la célèbre statue «la Vierge à l'Enfant» qui, fait très rare, sourient tous deux. A l'intérieur, on y trouve le tombeau du Sire de Bournonville, originaire de Marle, premier lieutenant de Jean sans Peur pendant la Guerre de Cent Ans. Au sortir de l'église, nous empruntons la ruelle du château pour aboutir sur les anciens remparts.
     


        Le château est maintenant propriété privée mais en suivant les remparts, on arrive au sommet de la Tour Nord Est et de là, une vue très large s'étend sur la vallée de la Serre et ses coteaux. On pouvait encore, il y a peu de temps, continuer la promenade par le Chemin de Ronde qui aboutit en ville mais il est en mauvais état et de ce fait impraticable.
     
        Amateurs d'histoire nous poursuivons par l'ancien grenier à sel, rue Lalouette. En descendant l'avenue Charles de Gaulle, on trouve l'ancien relais de poste qui conserve quelques sculptures. En face, dans un coin de la place, la plus vieille maison de Marle (1572). En continuant vers la gare, on passe vers un monument élevé à Saint Nicolas dont une chapelle désaffectée porte le nom. Dans toute la ville, des panneaux, indiquent les noms des anciennes rues, places et maisons, perpétuant ainsi le passé historique de la ville. Le seul restaurant ouvert le dimanche dans la région étant complet nous sacrifions l’indémodable sandwich à la boulangerie locale.
     


        Le temps redevient menaçant, la pluie n’est pas loin. Avant de rejoindre Laon et notre hôtel nous faisons une halte au Musée des temps barbares. Avant d'être un musée, cet endroit était un moulin banal, qui appartenait au domaine de Marle. Il fut construit au 12ième Siècle et fut ravagé par la force des eaux en 1750. Il fut rétabli par la suite aux frais du comte. Un souterrain le mettait en communication avec le haut manoir. Le moulin fut récemment transformé en «Musée des temps barbares». Ce musée est entièrement consacré à la période mérovingienne, d'après les fouilles de la nécropole et de l'habitat de Goudelancourt Les Pierrepont (6ième et 7ième Siècles)…
     
        L’Aisne, vitrine de l’Histoire grandeur nature !

       Bienvenue dans l’univers de l’Histoire de France ! Grâce à son rang de quatrième département français pour le nombre de ses monuments classés, l’Aisne, berceau de l’Histoire de France, vous emporte dans les couloirs du temps.

     Tout en profitant d’hébergements de charme, découvrez les chefs d’œuvre d’art gothique que sont les cathédrales de Laon ou de Soissons. Visitez le magnifique château des Princes de Condé, empruntez le célèbre Chemin des Dames ou explorez le Familistère Godin…

      Un seul regret : le temps. Nous avons rouillés après une semaine de pluie et sommes rentrés avec de la mousse sur nos chaussures. Bref un temps idéal pour les grenouilles ou les escargots…
 
 
 
Andrée et Armand 
 

Commentaires

Mamie-Cannelle le 03-10-2008 à 12:00:24
Ma fille habite à quelques km de Soissons et je passe devant le moulin à chaque fois que je vais la voir !!!

Blog très interressant et complet !!!

Bravo et bonne continuation !!!

MC.