A cheval sur l’Europe et l’Asie, la Turquie combine avec bonheur le faste des Mille et Une Nuits et l’efficacité d’un pays moderne. Pour nombre d’entre nous, elle constitue le rêve d’évasion par excellence. Un rêve tout à fait réalisable, car la Turquie offre d’innombrables possibilités touristiques, et son peuple connaît les règles de l’hospitalité…
A peine arrivé, l’étranger découvre le charme des villes et des villages turcs, qui est déjà celui de l’Orient de légende, l’immensité de paysages à l’échelle de l’Asie, la somptuosité de monuments qui rappellent l’opulence des sultans. Ailleurs, on parle d’un riche passé ; en Turquie, le passé est tout simplement fabuleux. Aucun des grands événements de l’histoire qui ne se soit déroulé, au moins en partie, dans ce pays. La moindre parcelle de sol semble imprégnée de vestiges : on piétine les restes de civilisations superposées. Combien de sites, combien de villes d’art surprennent par leur ampleur ? Sans doute est-ce là ce qui fonde la fierté de ce peuple. Cette séduisante mentalité de conquistador qui sommeille dans le cœur de chaque Turc…
Le passé remonte à 7 000 années et 65 états se sont formés sur ces territoires, jusqu’à aujourd’hui. Durant ces périodes qui ont duré de 5 000 ans avant J.-C. jusqu’en l’An 576 de notre ère, on y voit des restes des âges suivants : l’âge de pierre, le chalcolithique (cuivre), le bronze et l’âge du fer. Diverses civilisations s’y sont succédées. Dans l’Antiquité, les empires suivants s’y sont développés : Assyriens, Hellénistique, Perse, l’Empire d’Alexandre le Grand et l’Empire Romain. Au Moyen âge, s’est développé Byzance. Après le 13ième siècle, 26 seigneuries féodales anadoliotes (Beylik) se sont développés à la place de ces États disparus, pas plus grands en superficie que les provinces actuelles. C’est une de ces seigneuries, la Dynastie Ottomane (Osman Oğullan), qui, entre 1299 et 1922, remplaçant l’Empire Seldjoukide, s’étendra en Europe, Asie et Afrique pour y former l’immense Empire Ottoman. Sur ces terres, en lieu et place de cet Empire, s’édifiera la République Turque (1923) dont le fondateur et premier Président de la République fut le Maréchal Mustapha Kemal Atatürk…
Le jour n’est pas encore levé. Nous attendons silencieusement sur le premier trottoir de la gare routière d’Aix en Provence l’arrivée de notre moyen de transport. Les valises qui trépignent d’impatience sont maintenant à nos pieds. Cette fois ci nous tentons l’aventure dans un long périple autoroutier qui nous conduira en Asie. Mohamed (Momo pour les intimes) notre chauffeur et Corinne notre accompagnatrice arrivent dans un autocar flamboyant aux couleurs de « Bonnes Vacances » notre tour opérator. Les valises s’installent avant nous et nous prenons la route, direction la frontière italienne…
Quand nous arrivons à Vintimille, les forains déballent leurs marchandises dans un ballet incessant de cris et de mouvements d’humeur, La comédia d’el arte chauffe son répertoire pour la grande scène du marché qui va bientôt se jouer avec les premiers clients. Nous avons juste le temps de prendre notre premier cappuccino et le car reprend sa route…
Cela fait maintenant plusieurs minutes que nous longeons un immense parapet de béton recouvert de dessins et de tags, nouveau moyen de communication de la génération spontanée et d’artistes en manque de liberté. C’est sale, c’est gris, une multitude d’immondices jonche le sol, bienvenue à Gènes. Nous traversons les quartiers populaires et enfin rendus sur le port, nous dégustons un plat de spaghetti bolognaise à se faire péter la moustache dans une taverne de pêcheurs ou règne une cohue indescriptible…
Nous passons la nuit à Parme, connue pour ses jambons et sa chartreuse qui nous ravit aussi par la beauté de ses marbres blancs et roses qui habillent son baptistère et sa cathédrale. Dans la soirée nous cherchons en vain une épicerie ouverte pour goûter au fameux jambon. Dépités, nous rentrons à l’hôtel pour avaler un banal repas : La traditionnelle cuisine internationale, un comble au pays des pâtes fraîches…
Le voyage est long, nous passons donc par Padoue pour demander la protection de St Antoine. La ville s’anime autour de la piazza Cavour et nous profitons de la halte pour prendre une collation au café Pedrocchi, de style néoclassique. A l’époque romantique, ce café était fréquenté par l’élite libérale et notamment par Alfred de Musset…
Nous déjeunons à Trieste, une ville moderne qui s’allonge au fond d’un golfe au pied du plateau de Karst qui forme une côte escarpée aux magnifiques falaises blanches. Puis nous reprenons la route jusqu’à la frontière yougoslave pour atteindre Zagreb notre étape de nuit…
Zagreb, la capitale de la Croatie, que nous avons visité l’été passé, est toujours aussi germanique. Nous profitons de la longueur du jour pour effectuer une petite visite à la cathédrale, cette fois-ci sans guide car nous connaissons le chemin. Nous retrouvons même la demeure de notre guide local Milka, qui agréablement surprise de nous revoir, nous offre un thé à la menthe…
La Croatie et la Serbie sont traversées. Nous faisons un halte déjeuner à Belgrade, capitale de la Yougoslavie. Pas le temps de traîner car il faut reprendre la route pour la frontière bulgare et atteindre Sofia avant la nuit…
La capitale bulgare nous accueille dans un restaurant au décor traditionnel. L’ambiance est chaleureuse. Nos hôtes nous servent un repas slave arrosé de vodka, et une jeune troupe nous présente un spectacle de danses évoquant le folklore de la Bulgarie. Très tard dans la nuit un trio de musiciens, se déplaçant de table en table, viennent faire pleurer les violons. Les verres de vodka se vident, les cordes des instruments transpercent nos âmes, le romantisme reprend naissance, c’est une soirée exceptionnelle…
La nuit a été courte, mais nous nous levons heureux, comme si le violon avait apaisé notre fatigue. Nous avons le temps de rendre visite au Danube, aux vieux remparts de la ville et à la cathédrale orthodoxe avant de reprendre la route pour la frontière turque que nous franchissons à Edirne…
Quand on aborde la Turquie en venant de Bulgarie, Edirne apparaît comme une juxtaposition de groupes de maisons, séparés les uns des autres par des vergers et des rideaux de cyprès ou de peupliers, au-dessus desquels pointent çà et là des minarets. Comme de l’autre côté de la frontière, on y trouve les mêmes auberges sans étage, avec leur tonnelle où il fait bon siroter le raki, déguster les mêmes pastèques ou le même riz au mouton. Pourtant on perçoit à Edirne une différence subtile. La nonchalance des habitants n’est pas la même, le silence est d’une autre qualité, plus solennel, presque tragique. Ici, la vie semble flotter dans son cadre urbain comme un corps amaigri flotte dans un vêtement trop grand…
En fait, ce qui frappe, au seuil de cette étendue, c’est la brusque révélation de la steppe. En quelques kilomètres, on change de continent. La plaine de Roumélie provoque le premier face à face avec l’Asie. Ce territoire de steppe s’ouvre en forme d’éventail et Istanbul en occupe la pointe…
L’ancienne capitale, autrefois appelée Byzance puis Constantinople, nous offre les fastes d’un conte des « Mille et Une Nuits ». Au Grand Hôtel Tarabya***** notre lieu de résidence pour quatre jours, nous goûtons au plaisir du keyif (l’art de se relaxer). Nous squattons, en fin de soirée, le fond du bistrot pour fumer un bon narguilé et boire un verre de raki…
Paisibles, nos regards se portent sur la baie du Bosphore, quand soudain une agitation secoue l’hôtel. Tous les serveurs se précipitent sur le perron, un prince saoudien est annoncé. Et nous voyons entrer le prince en habit traditionnel bédouin accompagné de sa suite. Quelques instants plus tard une vingtaine de ses femmes voilées et tout de noir vêtues se présentent. Leur entrée est orchestrée comme un ballet burlesque. Des serviteurs du prince entourent le cortège et jettent en l’air sur leur passage des billets de 10 $ pour les serveurs courbés qui se précipitent pour les ramasser…
Quant à nous, pauvres globe-trotters, nous ne faisons plus le poids. Plus personne ne s’intéresse à nous. Nos verres sont vides. Il est impossible de se faire resservir. Le narguilé est éteint car l’employé chargé d’entretenir le foyer ne revient plus. Frustrés, nous nous dirigeons vers la salle à manger dans l’espoir de ne pas dîner en même temps que ce prince…
A six heures Istanbul s’éveille en sursaut. Du haut des mosquées s’élève soudain l’appel à la prière, qui se mêle aux sirènes des vapeurs, ces bateaux bus qui sillonnent le Bosphore. Auprès des embarcadères et dans les vieux quartiers, le commerce prospère. C’est en artistes que les marchands de quatre saisons empilent fruits et légumes. Les passants achètent une poignée de pistaches ou quelques prunes vertes qu’ils mangeront salées. Porteurs d’eau, écrivains publics, cireurs de chaussures se disputent le pavé avec les taxis jaunes et les marchands ambulants. Cette Istanbul populaire est le royaume du système « D », mais aussi celui de la gentillesse, car les Turcs sont de grands sentimentaux…
Autre temple du commerce, le Bazar égyptien magnifié par le parfum des épices et l’éclat de l’or. Mais pour faire des affaires, mieux vaut se perdre dans les ruelles alentour qui abritent les fameux Hans, d’anciens caravansérails transformés en échoppes grouillant d’activité. On y trouve à bas prix une profusion de vêtements en cuir et de beaux cachemires. Ambiance orientale garantie, tout comme dans le Grand Bazar, où se pressent chaque jour 500 000 visiteurs qui marchandent kilims, soieries et bijoux. Une véritable caverne d’Ali Baba, qui nous retiendra pendant des heures et nous fera craquer pour des robes de Shéhérazade, babouches de cuir et colliers d’or que nous n’oserons jamais porter ! Nous faisons une halte à la brasserie Havuzlu Lokanta pour déguster les délicieuses pâtisseries turques qui portent des noms troublants : « lèvres amoureuses, nombril de dame » ou encore « l’extase de l’Imam »…
Les jours suivants, nos pas nous mènent vers les faïences de la mosquée Bleue. A l’origine c’est la mosquée du Sultan Ahmet 1er, l’un des monuments les plus connus du monde turc et islamique. Un modèle le l’art classique turc. Cette mosquée royale fut la seule à comporter six minarets. On découvre de la porte qui donne accès à la cour intérieure, la fontaine des ablutions symboliques où une infidèle vient se rafraîchir…
Nous ne manquons pas non plus de nous imprégner de l’ambiance de celle de Soliman le Magnifique. C’est le plus important et le plus grand édifice de la ville. La beauté de son architecture, les proportions idéales et attirantes du style ottoman nous fascinent. La nef centrale avec ses quatre minarets est surmontée d’une grande coupole. L’entrée principale donne accès à un parvis intérieur entouré de balustrades et au milieu une fontaine des ablutions. L’unité, la clarté, la décoration mesurée de l’architecture intérieure renforcent l’aspect majestueux de cet édifice. Au pied du mihrab un nouvel Imam officie…
Considérée comme la 8ième merveille du monde, Sainte Sophie est identifiée comme le plus beau monument de l’architecture mondiale et de l’histoire de l’art. c’est une des rares œuvres qui a pu résister au temps et a pu survivre durant des siècles jusqu’à nos jours. Après avoir été pendant 916 ans la Première Eglise, et pendant 477 ans une mosquée, elle devient finalement par ordre d’Atatürk un musée. Ses architectes étaient Anthemius de Tralles et Isidore de Milet…
Reste le Topkapi, le richissime palais des sultans. Après s’être extasié devant les fabuleuses collections de vaisselle, de bijoux, d’émeraudes et de diamants, on s’attarde à plaisir dans les frais corridors de son harem et dans les jardins d’où l’on aperçoit la mer de Marmara…
On pénètre dans la première cour du palais par la porte impériale. La fontaine, à l’entrée de cette cour, est la plus belle œuvre de l’art turc du 18ième siècle. Jadis dans cette cour se trouvait l’Hôtel de la monnaie, les boulangeries du palais, les réserves de bois, le régiment des gardes, dans la terrasse inférieure des jardins potagers privés. Le premier monument du palais le Çinili Köşk se trouve aussi dans cette première cour. En entrant à gauche, dans la cour s’élève l’Eglise Sainte Irène, œuvre du 6ième siècle…
Le harem de Topkapi se compose de longs corridors et de 400 chambres dispersées autour de cours étroites et sombres. Cette partie du palais fut sans cesse aménagée et agrandie, elle fut dénommée le « Harem » car la Reine mère, les frères et sœurs, les autres membres de la famille royale, les serviteurs fidèles et les eunuques de la famille royale l’occupaient. Ce harem était rigoureusement interdit au monde extérieur…
De Topkapi on rejoint Eyüp en bateau. On longe les rives de la Corne d’Or, ce bras de mer jadis si beau où survivent quelques unes des célèbres maisons en bois qui font le charme d’Istanbul. C’est un quartier pittoresque qui a grandi autour d’un des lieux saints de l’islam…
Un sentier ombragé de cyprès et d’eucalyptus gravit la colline sacrée. Au sommet, un café solitaire, à qui Pierre Loti, romancier français, a donné son nom. Un vrai beau café, aux murs de boiseries rouges, avec salon de lecture, brasero pour l’hiver et tonnelles fleuries. Sur la terrasse panoramique nous sirotons un café turc. Istanbul est à nos pieds, s’étirant à l’infini avec ses mille coupoles et minarets qui semblent flotter dans l’air du soir. Un enchantement…
Par une belle soirée d’été, c’est au bord de l’eau que nous glanons encore de beaux souvenirs. Dans le quartier des pêcheurs de Kumkapi, on se régale de mezzés, de poissons grillés et de kebab d'agneau avec un ayran (une boisson au yaourt). Et là encore, on se dit qu’Istanbul sera toujours Byzance !…
Les Stanbouliotes fréquentent toujours les « gazinos », ces cabarets kitch, où nostalgie rime avec raki, la boisson nationale. Pour notre dernière soirée nous rejoignons cette effervescence tonique au Taslik Maksim, cabaret oriental du centre ville. Des chanteuses peroxydées y poussent la romance, les danseuses du ventre ondulent sous une pluie de fleurs lancées par un public extatique. Quelques uns d’entre nous sont invités à se déhancher avec ces superbes créatures sur scène. Le raki coule à flot. Toute la nuit, danses sensuelles et languissantes nous accaparent et nous finissons dans le petit matin frais comme des loukoums…
La brume n’est pas levée sur le Bosphore quand nous quittons Istanbul par le pont de l’Europe. Un gigantesque ouvrage qui relie le continent européen à l’Asie. Les cheveux ont du mal à rentrer dans la casquette, pourtant indispensable. « Momo », notre chauffeur, conduit en silence et en souplesse pour ne pas faire déborder le raki de nos estomacs. La route traverse une multitude de petits villages fermiers flanqués dans une végétation dense et verdoyante jusqu’à Bursa, notre étape de nuit…
L’antique Brusa qui mérite son surnom de Bursa la Verte est bâtie au pied de l’Ulu Dağ, l’un des monts Olympe des anciens. Ville d’art par excellence, elle évoque la douceur de vivre des premiers siècles ottomans et les raffinements infinis le l’islam. Fondée vers le 3ième siècle avant notre ère par Prusias 1er, roi de Bithynie, importante forteresse byzantine et station thermale des empereurs, Bursa est conquise par le sultan ottoman Osman Gazi après un siège de onze ans (1315-1326)…
Nous grimpons jusqu’à l’ancienne citadelle pour goûter la poésie de son esplanade. Là, confortablement attablé à la terrasse d’un des nombreux petits cafés, on découvre un vaste et verdoyant panorama, tout en admirant les türbe (mausolées) de sultans édifiés dans les jardins. En redescendant, on passe par la Muradiye Camii (mosquée de Murat II), aux admirables décors de faïence émaillée bleu turquoise, puis on contourne l’édifice pour aller flâner à l’ombre de ses coupoles, dans le cimetière de la Muradiye où rosiers, magnolias, cyprès et platanes environnent de nombreux et admirables türbe. Paradoxalement , ce cimetière est l’un des sites les plus riants de la ville !…
Ce matin nous partons pour une longue route étape, de plus de 500 kilomètres, pour nous rendre à l’ouest de la Turquie d’Asie, la région historique Seldjouk. L’Anatolie baignée par la mer Egée et la Méditerranée donne à ce rivage un aspect très accidenté. Ce ne sont que golfes, caps, promontoires, îles, tous les reliefs d’un littoral découpé, voire tourmenté, et d’une grande beauté. Une végétation souvent luxuriante ajoute son charme à cette côte riche en plages et en sites pittoresques. La côte occidentale de la Turquie d’Asie est une sorte de Riviera, en plus grand…
A partir de cette étape, sur plusieurs jours, nous remontons le littoral sur les traces d’Homère et d’Hérodote. D’innombrables vestiges d’un passé multimillénaire jalonne le parcours. Au fil des siècles, des camps préhistoriques, la ville de Troie, une vingtaine de cités grecques, dont quelques unes des plus fameuses : Ephèse, Izmir et Pergame, des ports romains, des établissements byzantins ou turcs sedjoukides ont entassé, le long de ces rivages, une profusion de monuments, dont les restes jaillissent du sol entre les fleurs et les herbes desséchées par le soleil : un paradis pour l’archéologue…
Ephèse a été bâtie en Anatolie de l’Ouest, la plus belle partie de l’Anatolie d’ailleurs. Nous pouvons le sentir avant de pénétrer dans la ville, à peine arrivés à ses portes. Il est difficile d’imaginer la beauté de cette cité à l’époque romaine où elle était la capitale de 500 villes anatoliennes, époque où Homère écrivait son Œuvre immortelle, époque où Saint Jean découvrait le silence et la paix. Epoque lointaine où l’on remarquait de loin, la mer, les marches du merveilleux théâtre et où les brillantes et colossales colonnes d’Artémis vous éblouissaient. Les ruines d’Ephèse sont belles. Malgré leur ancienneté, malgré le vent des siècles qui a soufflé, malgré les destructions, ses vestiges demeurent dans toute leur majesté et leur ampleur sur plusieurs emplacements de l’ancienne ville. Cependant, l’Éphèse chrétienne est moins bien connue, et pourtant elle apparaît d’une grande importance si l’on considère qu’elle accueillit ceux que l’on peut nommer les Témoins du Coup de Lance, à savoir la Vierge Marie, Jean, le disciple que Jésus aimait, et Ste Marie Madeleine…
La fontaine de Trajan située à gauche au pied de la montagne Panayir en montant après le temple d’Hadrien a été construite à la fin du 1er siècle et dédiée à l’Empereur Trajan. Sa hauteur est de 12 mètres. Elle est à deux étages. On a découvert là 12 statues de Vénus, Satyre, Poséidon ainsi que les grands noms des familles impériales. Dans l’avenue Curetiale, qui mène à la bibliothèque Celsius, la statue sans tête de droite est celle d’une doctoresse qui rendit de grands services à l’époque byzantine…
A cette époque les apôtres de Jésus, Saint Paul et Saint Jean vécurent dans ces lieux en tant que précurseurs de la religion chrétienne. Durant cinq à six ans Saint Jean demeura à Ephèse en travaillant dans son magasin. Il vécut les dernières années de sa vie à Ephèse où il écrivit l’Evangile et mourut. Sa tombe est sur la colline Ayasuluk. L’église qui fut érigée sur sa tombe par l’Empereur Justinien est l’un des gigantesques monuments du Moyen Age. Au premier plan se trouve l’église Saint Jean et derrière la forteresse construite au Moyen Age. Cette forteresse a été employée aussi à partir du 14ième siècle par les Seldjoukides qui se sont installés là…
Bergame était dans l’antiquité une métropole célèbre dans le monde entier du point de vue artistique et culturel. Elle s’étend au pied des pentes de l’Acropole. Elle est arrivée jusqu’aux turcs sans rien perdre de ses richesses. On y admire les plus beaux chefs d’œuvres de l’art hellénistique : temples, palais, agoras, gymnases, Temple de Jupiter (Zeus). C’est là que vécut le célèbre médecin Galien. C’est là que se trouve le fameux Temple d’Esculape, Dieu de la Médecine, prisé dans le monde entier. La fameuse bibliothèque de Bergame devint incomparable une fois qu’eut brûlé la prestigieuse Bibliothèque d’Alexandrie. C’est là que fut inventé le fameux papier dit de Bergamone. Une des sept églises fondées en Anatolie par Saint Jean s’y trouvait…
La ville de Troie (Truva) fut fondée en 3 000 ans avant notre ère. C’est d’elle que vint l’inspiration d’Homère pour une partie de son Iliade qui rapporte la légende du cheval de bois introduit frauduleusement par les soldats grecs qui s’y trouvaient cachés et qui, prestement descendus, ouvrirent les portes de la ville aux Grecs sans coup férir, après un siège interminable qui dura de longues années. On y visite les vestiges prestigieux de ses remparts en terre séchée, son Palais royal, le Temple à Athénée, l’agora, l’odéon, l’amphithéâtre. Au retour on assiste à la descente du dernier grec oublié dans le cheval en 1 200 av J.-C…
Nous passons notre dernière nuit orientale à Canakkale sur les bords de la mer Egée. Cette ville se développa dès 1452 sous la protection des remparts entourant le Détroit des Dardanelles connu pour les combats qui s’y déroulèrent sur terre comme sur mer en 1915. Ce matin nous franchissons en bateau le détroit et nous reprenons notre route, direction la frontière grecque pour rejoindre Salonique notre prochaine étape…
Thessaloniki, a été fondée en 315 av. J.-C. par le diadoque (général) macédonien Cassandre qui lui donna le nom de sa femme Thessalonica, sœur d’Alexandre le Grand. Aujourd’hui c’est la seconde ville et le second port de Grèce, capitale de la Macédoine. Encadrée par des usines à l’Ouest, par un quartier haut de caractère oriental au Nord et par un secteur résidentiel à l’Est, Salonique a pour centre la place Aristotelous, ouverte sur la mer. Son site face au golfe, ses artères bordées d’arbres et de magasins cossus, ses églises byzantines ne manquent pas de charme…
Les remparts entourent principalement la ville haute et l’acropole où des ruelles en lacis et des maisonnettes à terrasses évoquent les casbahs orientales . Nous partons du cimetière de la rue Zografou, puis nous longeons d’abord l’enceinte par l’extérieur en direction du Nord ; à un angle une portion d’appareil en pierres massives marque l’époque hellénistique. Plus haut apparaît la grosse tour de la Chaîne (15ième siècle), mais avant d’y arriver on pénètre à l’intérieur de l’enceinte pour gagner l’entrée de l’acropole. De ce côté les remparts, restaurés récemment, offrent une belle perspective que jalonnent les tours Paléologue et d’Andronic II (14ième siècle). Ce soir au restaurant nous goûtons notre première Moussaka…
Dans le petit matin nous reprenons la route pour traverser la vallée du Pénée et atteindre Kalambaka. Au dessus se découpe une forêt de rochers aux formes fantastiques, masses sombres de ton « gris éléphant ». Ces monstres rocheux aux parois vertigineuses, portent à leur sommet les célèbres monastères cénobitiques, les Météores (de « météora » : suspendus dans les airs). Au 11ième siècle, des moines ermites commencent à occuper les grottes des Météores. Au 14ième siècle, pour se protéger des invasions, les moines débutent la construction de ces monastères incroyables…
Les 15ième et 16ième siècles constituèrent la grande période des monastères dont le nombre atteignit 24 et qui furent décorés de fresques ou d’icônes par de grands artistes, tels le moine Théophane le Crétois, qui peignit aussi le mont Athos, et ses disciples. Aujourd’hui trois monastères seulement sont occupés par des moines ou des moniales, le Grand Météore, Varlaam, Agios Stefanos que nous visitons…
Naguère les monastères étaient inaccessibles autrement que par des échelles amovibles ou des nacelles suspendues à des cordes et tractées par un treuil jusqu’à une tour en surplomb dite « tour du vrizoni » : d’après les voyageurs d’antan, les cordes n’étaient remplacées qu’après rupture ! Aujourd'hui, des escaliers et des passerelles ont été aménagés pour que nous, pauvres touristes, puissions accéder à certains d'entre eux…
Pas de chance ! « la croisière ne s’amuse pas ». En effet, la mer Adriatique réputée pour son calme traditionnel, se paye une exception pendant notre traversée : tempête force huit. Bonjour les dégâts, même les marins du bord sont malades. Le navire est désert, tout le monde est dans sa couchette la cuvette à portée de main. Nous ne serons pas plus d’une dizaine à braver la grande salle à manger pour tenir compagnie au capitaine qui nous invite bien entendu à sa table. A l’arrivée à Rimini, les passagers jaunes comme des citrons ont du mal à marcher…
Heureusement que le car n’a pas eu le mal de mer. Ce n’est pas le cas de Momo le chauffeur qui ressemble à un asiatique un soir de Saké. Il a du mal à rassembler ses esprits pour faire monter les voyageurs qui eux aussi ressemblent à de vieux papiers froissés. C’est dans un silence de carmélite que nous reprenons la route. Nous avons rendez-vous à Ravenne pour voir surgir de la pénombre une église et une mini-chapelle modestement éclairées, dont la simplicité extérieure ne laisse pas prévoir la somptuosité des mosaïques turquoises et violettes qui en décorent l’intérieur. C’est le choc. Rares et précieuses comme un trésor d’Orient, et sans aucun doute les plus belles d’Italie, elles sont éblouissantes…
La nuit a été réparatrice. Au petit déjeuner les commentaires sur la tempête en font rire beaucoup. Chacun taquine son voisin ou sa voisine sur les péripéties de la traversée. Nous quittons enfin Ravenne sous un soleil radieux pour quelques kilomètres seulement. Un arrêt est prévu pour visiter la basilique de Saint Apollinaire in Classe…
Une autre splendeur de l’architecture italienne. La vue de cette basilique est suggestive car elle se dresse, isolée et majestueuse, sur l’immense plaine verte qui contraste avec le rouge des briques avec lesquelles elle a été construite. Sur la façade, dont la partie haute s’ouvre encore sur une fenêtre à deux meneaux d’origine, s’appuie un narthex reconstruit tel qu’on le voit au début de notre siècle et flanqué à gauche d’une construction en forme de tour (très remaniée) ; de l’autre construction, à droite, il ne reste que les fondations, tout comme sont invisibles les restes du grand portique à quatre arcades qui s’étendait jusqu’à la rue actuelle…
Nous atteignons Parme en fin de soirée et immédiatement nous partons dans les ruelles de la vieille ville à la recherche du fameux jambon. Il faut croire que le jambon de Parme est une légende car nous en avons toujours pas trouvé ? Il faudra attendre le dîner à l’hôtel et prétexter un ennui gastrique pour se faire servir, en remplacement de la traditionnelle tranche de veau à la milanaise, deux tranches de jambon de Parme. Quel luxe !…
Nous bouclons nos valises pour la dernière fois, et très tôt le matin nous reprenons la route. Vintimille, toujours aussi animée, est traversée en début d’après-midi. C’est autour de Nice quelques heures plus tard. Ça sent l’écurie quand nous empruntons l’autoroute. Trois heures plus tard les premières lumières d’Aix en Provence pointent dans le loin. L’aventure s’achève comme elle a commencé sur les trottoirs de la gare routière…