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Titre du blog : Les Black's Foot
Auteur : Jakin
Date de création : 03-09-2008
 
posté le 20-09-2008 à 05:13:26

LES HOMMES ELEVENT TROP DE MURS ET NE CONSTRUISENT PAS ASSEZ DE PONTS




    Mon tracé, dans une première partie, questionne et énonce, afin de permettre la construction, au propre comme au figuré, de la citation d’Isaac Newton. La deuxième partie tente une approche du comportement maçonnique pour faire face à cette situation…

    Des Murs et des Hommes, comme un clin d’œil à « Des Souris et des Hommes » écrit en 1937 par le romancier humaniste John Steinbeck.
 
    Le Mur des Lamentations… Des Juifs du monde entier viennent y prier  et peut être prient-ils pour un présent meilleur que leur passé et ainsi murmurent-ils à ce mur leur crainte : « Les hommes élèvent trop de murs et ne construisent pas assez de ponts ».

    De tout temps et dans toute l’histoire, les hommes ont construit des murs car c’est une action qui s’inscrit dans les gènes de l’humanité. Des murs fortifiés de nos cités Grecques et Babylonienne à la Muraille de Chine, il était plus facile de construire la civilisation à l’hombre d’un mur. Même si plus tard ces mêmes hommes construisirent des ponts pour passer ces mêmes murs. Ce mur est d’autant plus naturel qu’il constitue finalement une facilité intellectuelle. Facilité intellectuelle dénoncée en son temps par Montaigne dans sa définition de la barbarie.

    Car pour construire un mur, rien de plus facile : un peu de ciment, des briques ou plus original du béton. L’Homme est enfermé ou a cloîtré des êtres humains dans des prisons de pierres, de barbelés, afin de vaincre sa plus grande peur : la différence.

    L’élaboration d’un pont est plus compliquée pour l’Homme, car il doit évaluer la distance qui le sépare des autres, ensuite des plans sont établis pour construire ce passage et enfin il nous faut suivre cette voie et aller à la rencontre  de notre Frère l’Homme. Mais il semblerait que celui-ci ne soit pas un aventurier et qu’il souffre du vertige. Il est plutôt casanier et cimenté dans son petit monde. En réalité, il préfère s’entourer de murs…
    
    Mur et pont, au sens propre ou figuré, ne sont-il pas finalement des constructions humaines étroitement liées ? N’y a-t-il pas en effet un risque à vouloir aimer son prochain comme soi-même ?

    Isaac Newton né à la mort de Galilée, s’interroge sur cet aspect contradictoire du genre humain. Mais l’époque ne permet pas de faire une distinction entre raisons politiques, animosités religieuses, convictions idéologiques et intérêts économiques pour expliquer le fait que les hommes en viennent à construire des murs plutôt que des ponts. Cette citation reprise au 20ième siècle par Saint-Exupéry donnera, cette fois-ci, toute la mesure du drame qui se joue dans les arcanes de l’Humanité…
      
    Murs d’Europe : « Les Murs de la Honte » (Croatie, Bosnie Herzégovine, Serbie Monténégro) représentent le contexte des guerres civiles, « The Green Line » (République de Chypre) les divisions politiques, « Peace Line » (Ulster), illustre le sujet des inimitées religieuses, « Rêve d’Ouest » (Berlin) représente le cloisonnement et la reproduction sociale, « Les oubliés du Goulag » (Fédération de Russie) représente la répression politique. Murs d’Asie : « Route 181 » (Israël, Cisjordanie), « Le mur de la déraison » (Corée du Sud, Corée du Nord). Murs d’Amérique : « La barrière économique » (Etats-Unis, Mexique).

    En juillet 2002 commençait la construction du mur entre l’Etat d’Israël et les Territoires palestiniens de Cisjordanie, 13 années après la chute du mur de Berlin et des états communistes. Jusqu’alors ne subsistait qu’un mur entre les deux Corées, et un autre séparant l’île de Chypre en deux. Nicosie reste l’ultime capitale européenne divisée par une frontière matérialisée. Matérialisée est bien le mot parce qu’en Irlande du Nord, la frontière est dans les têtes, entre catholiques et protestants. Pourtant le « Freedom Wall » est une matérialisation de cet antagonisme qui existe depuis les deux guerres civiles en 1921.

    Les Etats-Unis se protègent de l’immigration des pays d’Amérique latine par une immense frontière en béton et barbelés que des milliers de mexicains essayent de franchir chaque jour, dans l’espoir de réaliser le rêve américain. Et puis il y a ces murs qui ont gardé les traces de la guerre civile, c’est le cas en Ex-yougoslavie (Croatie, Bosnie Herzégovine, Serbie - Monténégro).

    Notons que l’Inde envisage à son tour de se doter d’un mur qui la séparerait du Pakistan aux fins d’éviter les incursions de terroristes islamistes en territoire indien…

    Ce sont bien des hommes qui sont responsables de l’état de ces murs, ils ne se sont pas construits tout seuls. Ce n’est pas fortuit si l’homme éprouve le besoin de se séparer des autres. Car l’intolérance de nos dirigeants, pratiquée comme un sport de compétition, pousse l’homme à l’individualisme et le rend quasi hermétique aux relations culturelles qu’il pourrait entretenir avec d’autres coutumes…

    De la Bosnie à la Tchétchénie, de l’Algérie à l’Afghanistan, de l’Irak au Soudan, Burundi, Sierra Leone, Centre Afrique, etc., les tragédies sanglantes ont dénaturé l’humanité et risquent de l’entraîner dans une spirale infernale de vengeance, de haine et de violence. Nous devons l’arrêter. Nous devons, nous maçon, faire entendre notre voix, nous sommes des hommes et des femmes de paix, mais nous sommes aussi des hommes et des femmes en guerre, en guerre contre la guerre, contre l’intolérance et l’intolérable, contre l’injustice et la barbarie. Nous avons ouvert cet espace de dialogue et d’échange pour bousculer ces murs de haines et construire ces ponts de compréhension, de justice et de paix…

    « Le monde est dangereux à vivre ! Non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire » dira  Albert Einstein. « Démolir le Mur en pensée prendra plus de temps qu’il n’en faudra à une entreprise de travaux pour faire le même travail »  souligne Peter Schneider. Ce qui fera dire au philosophe Alain « La paix n’est pas, la paix n’est jamais. Il faut la faire, et d’abord la vouloir, et donc y croire ». Voilà ici posé le sens de la contradiction de l’humanité dans son aspect profane.
   
    Quoi qu’il en soit, l’ignorance, l’incompréhension, la peur de celui qui habite de l’autre côté, n’y sont jamais étrangères. Dans « L’Axe du Loup » Sylvain Tesson écrivait en 2004 : « l’enfer c’est le voisinage. Parce que nous le connaissons mieux, ce qui est proche effraie d’avantage que ce qui est lointain ». Si la destruction du pont de Mostar, le 9 novembre 1993, fut malgré lui le symbole de la rupture communautaire en Bosnie Herzégovine, sa reconstruction fut celui du rapprochement. « Nous sommes présents à Mostar afin de faire revivre un patrimoine exceptionnel qui, après avoir été pris pour cible, doit devenir un signe de ralliement, un signe de reconnaissance, le symbole fort d’une identité plurielle construite sur une confiance réciproque », déclarait Koïchiro Matsuura (le directeur général de l’UNESCO)…

    C’est dans cette phrase, pas du tout anodine, que prononce Koïchiro Matsuura sur ce pont nouvellement reconstruit, comme le ferait un Frère s’adressant à d’autres dans le Temple de la Sagesse, que surgit une vérité. « Un signe de ralliement », « un signe de reconnaissance », « Un symbole fort », « une identité plurielle », « une confiance réciproque », tout un ensemble de situation que le Franc-Maçon pratique dans la construction de son temple intérieur pour découvrir le chemin vers la Lumière.

    Ce Franc-Maçon, comme le rappel Sylvain Tesson, n’oubliera pas que « l’enfer c’est le voisinage », « c’est ce que nous connaissons le mieux » comme nous l’a rappelé le Vénérable Maître lors de notre Initiation : « Ce n’est pas toujours devant soi qu’on rencontre ses ennemis. Les plus à craindre se trouvent souvent derrière soi. Veuillez vous retourner… ». En voyant son visage dans le miroir, l’Apprenti comprend alors toute la signification du symbole.

    Il appartient donc en premier lieu, aux Francs-Maçons de détruirent leurs murs intérieurs et construirent leurs ponts vers l’extérieur afin que la Franc-Maçonnerie grandisse pour diffuser le plus largement possible son idéal de Fraternité. Le travail est colossal, il usera plusieurs générations de tabliers.

    Mais l’important c’est de croire. De croire dans sa capacité évolutive, comme nous l’a enseigné le Grand Architecte de l’Univers. Avoir confiance dans sa démarche, dans son travail et dans son action personnelle pour ne pas oublier que c’est de la multitude que naît l’Unité.

    « Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des Frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots » disait Martin Luther King. Pour construire ces ponts indispensables à notre équilibre et au développement moral, nul besoin d’être ingénieur… mais tout simplement ingénieux et généreux !

    Il est bien plus facile de s’enfermer, de fuir, mais faire un pas vers l’autre démontre déjà une certaine sagesse. C’est ainsi que nous nous rapprocherons d’un monde en paix. Tous ces murs évoqués, ne tomberons que si chacun commence par enlever une pierre. Alors encore une fois prenons notre ciseau et notre maillet et que tombe notre fierté dévastatrice, notre ambition malfaisante, nos convictions qui emprisonnent…Et tu seras un Homme, mon Frère ! et non une ombre glissante au pied d’un mur…

 
Jakin    
 
 
 
 

Commentaires

Virusbleu le 20-09-2008 à 06:18:03
Merci de ton passage et de ton gentil com..


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