On peut dire que l'Ascension, par son déroulement surnaturel ne semble pas avoir surpris outre mesure les Apôtres, tout imprégnés qu'ils étaient de l'ambiance particulière dans laquelle ils venaient de vivre les derniers jours auprès du Messie. L'alchimiste quant à lui a retenu que l'évènement était en concordance avec la nouvelle lune, puisque le séjour de Jésus sur terre après la résurrection dura une lunaison et demie, soit quarante jours. La symbolique alchimique a souvent voilé la phase de multiplication qui succède à l'obtention de la pierre philosophale derrière l'image du Pélican, oiseau que les chrétiens choisirent pour symboliser le sacrifice du Rédempteur puisque c'est bien en se blessant qu'il nourrit sa progéniture, et que c'est par un acte analogue que l'humanité a été sauvée par le Christ. Certains traités alchimique affirment que l'Adepte qui se trouve en possession de la pierre philosophale peut en exalter le pouvoir par une série d'opération lui permettant d'obtenir une pierre dont les vertus sont extrêmement puissantes. Basile Valentin ne manqua pas de signaler ce point de pratique dans la 11ième de ses "clefs". Pour préparer le souffre incombustible, autre nom de la pierre philosophale, il convient donc d'attendre que la mer salée ait englouti le corps et, derechef, l'ait rejeté de son sein. Ensuite, élève ce corps en son degré, afin qu'il précède, de beaucoup, par son éclat, toutes les autres étoiles du ciel, et, dans sa nature, qu'il regorge de sang, ressemblant au pélican, lorsqu'il est blessé à la poitrine, sans affaiblissement de son corps. Les alchimistes chrétiens ont donc considéré que le sacrifice du Christ est la représentation de cette opération. Il est même permis d'affirmer dans ce cas que la rédemption de l'humanité, qui s'opère par la vertu du sang versé sur la Croix, a été assimilée à une phase de multiplication de l'archétype de l'homme parfait, représenté par le Christ. La résurrection du Christ confirme donc pour l'alchimiste, ce que l'Adeptat laisse entrevoir. L'alchimiste verra sans doute dans cet évènement extraordinaire, un symbole de l'orientation de la pierre philosophale dans le domaine humain, voir un baptême par le feu. Si on veut utiliser le vocabulaire alchimique, on peut dire qu'il fallait que les Apôtres deviennent dépositaires de la vertu "transmutatoire" du Christ afin que, par "projections successives", l'humanité s'approchât de l'état idéal indispensable à la rédemption collective. Dans le domaine de l'alchimie, les textes nous disent qu'il serait erroné de croire que la pierre philosophale, telle qu'elle est obtenue après l'éclosion de l'œuf philosophique, puisse transmuter les métaux. Ce n'est qu'en l'orientant dans le domaine métallique qu'elle acquiert les vertus indispensables à ce changement de structure, et plus exactement il convient de la conjoindre à l'or ou à l'argent selon l'orientation que l'on choisit. Dès lors l'Adepte est en possession de la pierre au blanc ou au rouge, qui est la poudre de projection. C'est elle que cherchaient les "souffleurs" plus avides d'or que de sagesse, et qui doit permettre à l'Adepte devenu riche de rendre hommage au Créateur par les nombreuses donations qu'il peut effectuer, sans pour cela faire étalage d'une saine opulence. L'histoire de l'alchimie affirme que Nicolas Flamel fut le plus bel exemple, devenu fort célèbre, d'alchimiste profondément chrétien qui multiplia, grâce à la pierre philosophale, les donations sous forme d'hôpitaux et d'églises. C'est à Philatète que nous ferons encore appel pour illustrer la pratique d'une projection : "Prends alors un peu de cette matière et projette-la sur n'importe quel métal fondu et purgé, en aussi grande quantité que la pierre pourra teindre ; et tu obtiendras de l'or ou de l'argent plus pur que la nature n'en saura jamais donner". Cet héritage est bien pour l'alchimiste le fruit que la science d'Hermès promet au chercheur depuis des siècles, et dont les textes unanimes disent qu'il n'est obtenu qu'avec l'aide particulière de Dieu. Symboliquement ils soumettaient la matière minérale au drame sacré que le Christ vécut dans sa chair, afin d'obtenir la Rédemption.