En s'appuyant sur des textes anciens et en observant les pratiques des sociétés dans le monde, le règne végétal a toujours eu sur les hommes, une grande influence. Dans le cadre du religieux par exemple, l'odeur des plantes est sollicitée. C'est ainsi, que dans la Bible, des conseils précis en matière de fabrication d'encens à base de plantes sont donnés (Exode XXX, 34). Dans l'ancienne Egypte, Râ était adoré au lever du soleil, avec de l'Oliban (Boswalia Cartéri), à midi, la Myrrhe (Balsamodendron) était utilisée, le soir, un encens composé de seize éléments brûlait devant l'autel de cette divinité. On dit que l’encens vient du pays de Pount. Bien qu'on n'ait pas pu situer avec précision l'emplacement géographique du pays de Pount et qu'il reste un mystère pour les égyptologues d'aujourd'hui, une théorie le placerait en Somalie. La reine Hatschepsout envoya une grande expédition relatée en 1493 avant J.C. et commandée par Nehasi vers le Pount dans un but commercial. A cette époque le pharaon Thoutmosis III étant trop jeune pour régner, c'est Hatshepsout, demi-sœur et grande épouse de Thoutmosis II qui assurera la régence avant de se faire couronner pharaon. L'un des faits les plus marquant de son règne est l'expédition au pays de Pount relatée par le bas-relief de son remarquable temple funéraire de Dair el Bahari. Nehasi, envoyé de la reine Hatschepsout ramena de ces contrées, des arbres à encens qui furent replantés sur les terrasses du temple funéraire de la reine à Deir el-Bahari, où il fallut creuser le roc pour leur aménager des fosses de terre végétale. Des entreprise de ce genre avaient déjà été organisées à plusieurs reprises dés l'ancien Empire. Les Phéniciens quant à eux, établirent un comptoir à Zeila et Berbera,à partir du 10ième siècle avant J.C. Suivant Pline l’Ancien les Grecs le nomment Sariba, c’est à dire « secret » et les Minéens passent pour avoir été les premiers marchands d’encens. Toujours selon Pline, personne, en dehors des Arabes n’a le privilège de voir l’arbre à encens et seules plus de trois mille familles pouvaient prétendre, de manière héréditaire, au droit d’exploitation et de vente de cette résine. Il distinguait, par ailleurs, l’encens mâle de l’encens femelle et expliquait le prix, faramineux, de cette substance par le fait qu’il fallait compter à l’encens plus de soixante cinq étapes de chameau, c’est à dire, actuellement, près de 3600 km avant d’arriver au port de Gaza, en Judée, d’où il était expédié à Rome. Parvenu à destination il était brûlé (incensum), d’où son nom actuel, sur l’Autel des Holocaustes. Une très ancienne tradition romaine voulait qu’il soit consumé dans le sacrum (os sacré) de l’animal sacrifié aux Dieux. Les prêtres avaient en effet remarqué que cet os comportait de nombreux trous favorables à la combustion des charbons ardents et devait donc servir à cet usage exclusif. L’encens fut également utilisé, par la suite, à l’extérieur des temples, pour éviter la propagation des épidémies et Hippocrate, lui-même, le prescrit pour cet usage. De ce fait, l’encens devenant en quelque sorte un médicament destiné à des fumigations, il perdit son caractère initialement rituel et sacré et devint donc profane. Concernant la Myrrhe, proche cousine, une légende relate que Myrrha, fille de Kyrinas, Roi de Chypre, l’Ile des Parfums, eut avec ce dernier, fort bel homme, des rapports incestueux. Les Dieux, comme punition, la transformèrent en un arbuste dont la sève parfumée donna naissance à Adonis. Avec de telles références, l’encens ne peut donc être qu’un peu magique ! Mythes, symbolismes et réalités ont donc constitué, tout au long des âges et sur tous les continents, une histoire qui relate l'action du règne végétal sur la vie des hommes. Les pratiques magiques, que l'on observe universellement, sont fondées sur ces traditions. Depuis l'antiquité la plus reculée, toutes les religions ont utilisé l'encens pour établir un lien entre la terre et le ciel et transporter ainsi les prières. Ce symbolisme relève à la fois de la fumée, du parfum et des composantes pures qui servent à la préparer. De tous les temps donc, on faisait brûler l 'encens sur des braises pour en répandre l'odeur et s'attirer ainsi les faveurs de dieux. L'encens est un essentiel utilisé rituellement, tant dans les religions que dans les arts divinatoires ou en magie . Le fait d'encenser l'endroit où l'on opère aide à la concentration, purifie le lieu ainsi que chaque chose dont on se sert lors du rituel. Il prépare l'esprit à être réceptif. Dans le rituel de la société somali, l'encens a une grande importance, car on lui prête aussi des vertus purificatrices. L'encens est brûlé lors des cérémonies religieuses, de même il est dit qu'il convient aussi d'en brûler chez soi tous les jours au crépuscule. Elément essentiel du rite, le brûle-parfums ( idin ) occupe le centre des habitations. Un exemple en est le rituel du 'madaxshub' vocable formé de deux mot madax=tête et shub=le fait de verser, dans ce cas il s'agit de l'huile. Les femmes, amies et voisines, se réunissent autour de la femme enceinte qui va bientôt accoucher. Sur le derin ( natte) on sert le bun ( huile bouillie et parfumé avec des graines de café), servi dans un kurbin iyo fandhaal (sorte de récipient en bois et sa louche en bois) que chaque convive utilise pour verser un peu de cette huile bouillante dans le creux de sa main pour ensuite s'en enduire le front en signe de prière et de respect : durant tout ce temps l'encens est au centre du rituel: braises et encens dosés pour obtenir des volutes en harmonie avec la prière.